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William WALKER, Soldat de fortune

Traduction d’un article de J. CRUTCHFIELD paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1986

Demandez-voir à l’Américain moyen qui était William WALKER et il y a des chances que tout ce que vous aurez en réponse sera un regard étonné. Or et pendant la décade de 1850, WALKER état un nom qui se prononçait dans tous les foyers des Etats Unis tout entiers. Un des premiers de ces sortes de mercenaires que l’on appelle communément « soldats de fortune » et le seul autochtone américain qui fût jamais élu à la tête d’un pays étranger, WALKER passa ces années-là à faire la une des journaux avec ses exploits au Mexique, au Nicaragua et au Honduras.Des rencontres fréquentes avec des hommes d’affaires aussi importants que Cornelius VANDERBILT, ce magnat du transport et du rail qui voulait construire un canal à travers l’Amérique Centrale, et même le Président Franklin PIERCE ou James BUCHANAN avec qui il s’occupait des droits et des responsabilités des citoyens américains à l’étranger, avaient fait à WALKER la publicité dont il avait besoin auprès de l’opinion publique pour gagner le soutien des masses à ses missions indépendantes.Qui était cet aventurier qui fréquenta du magnat des affaires au Président Américain ? Pourquoi ce petit homme, mesurant à peine cinq pieds et six pouces de haut et pesant un peu plus de cent livres, restait-il totalement sans la moindre impression devant les hommes d’affaire ou le gouvernement des Etats Unis, lesquels fronçaient tous les deux les sourcils au vu et au su de ses activités théâtrales ? Qu’est-ce qu’il y eut en coulisses qui le poussa à envahir le Nicaragua en 1855 et de s’y faire élire président en moins de cinq mois au cours d’élections totalement libres ? Et puis, qu’était ce petit quelque chose qu’il dégageait, qui faisait qu’on le respectait, ou qu’on le craignait selon la manière dont on voit les choses, au point que ce gouvernement rebelle fut officiellement reconnu par les Etats Unis ? Vraiment, qui était ce William WALKER, cet homme à qui l’Histoire donnerait un jour le nom de « Les yeux gris du destin », mais que si peu d’Américains connaissent aujourd’hui, même de loin ? On ne connaîtra jamais les réponses à certaines de ces questions, mais d’autres font transparaître un peu de lumière, même s’il y en a peu, sur ce mystérieux Américain qui tint toute l’Amérique Centrale à sa botte durant les années 1850.

William WALKER est né à Nashville, Tennessee, le 8 Mai 1824. La maison familiale se trouvait dans l’un des quartiers résidentiels les plus chics de la ville. Il naquit de Mary et James WALKER, à une époque où Nashville était l’une des villes les plus importantes du pays. Ville natale du futur Président des Etats Unis Andrew JACKSON, Nashville n’avait été fondée que depuis 44 ans lorsque WALKER vint au monde, mais la petite ville sur les berges de la rivière Cumberland s’était déjà gravée sa place dans les politiques d’état et nationale. Le père de WALKER, James, était un agent d’assurance de Nashville qui avait réussi, et la famille WALKER était très respectée dans les milieux sociaux et d’affaires. Mary s’était convertie récemment à cette nouvelle religion appelée les Disciples du Christ, et même James, auparavant presbytérien dévot, avait orienté sa foi vers la nouvelle secte. Contrairement à ce qu’il apprit plus tard, le jeune William fut éduqué au sein d’un foyer où l’on craignait Dieu et où on lisait la Bible très souvent. A l’âge de quatorze ans, William WALKER devint l’un des garçons les plus jeunes diplômés de l’Université de Nashville, et major de promotion en plus de cela. Ses parents espéraient du jeune garçon qu’il embrasserait la carrière cléricale, mais un intérêt précoce pour la médecine et une amitié avec un éminent docteur local, convainquirent le jeune homme que son futur à Nashville serait comme médecin. En 1843, après avoir été diplômé à la Faculté de Médecine de l’Université de Pennsylvanie, à nouveau major de promotion, il revint dans sa ville natale, devenant sans aucun doute le plus jeune docteur en médecine des Etats Unis. Mais il avait toujours la bougeotte, et WALKER commença bientôt à s’ennuyer dans son cabinet tout neuf. Il décida de s’inscrire à l’Université d’Edinburgh, et c’est ainsi qu’il partit vers l’Ecosse dans le but de poursuivre ses études. Après à peine deux mois à l’Université, il partit pour Paris. C’est là, après un séjour de plusieurs mois au cours duquel son attention fut attirée par les inégalités de la médecine devant les pauvres, que le jeune Dr. WALKER perçut ses premières vibrations de désenchantement pour le domaine médical. Continuant son voyage sabbatique, il se rendit à Heidelberg puis à travers la majeure partie de l’Europe, avant d’arriver à Londres en 1845. De retour à Nashville, WALKER y trouva sa mère en train de mourir. Son incapacité à aider, dans ses derniers jours, la seule personne de sa vie qu’il aimait et respectait vraiment, donna le coup de grâce à son dégoût grandissant pour la médecine.

A présent, WALKER entrait dans une nouvelle phase de sa vie. Il déménagea à New Orleans et se mit à étudier le droit. Admis au barreau de la Louisiane en 1847, il débuta comme homme de loi privé. Mais sa carrière légale fut aussi brève que celle qu’il avait suivi dans la médecine. En 1848, il embrassa furieusement une troisième vocation, celle du journalisme. Le travail de journaliste semblait l’intéresser, et son nouveau travail le mena en Californie. Au cours de son rôle éditorial pour un journal de San Francisco, WALKER se mit à se sentir obsédé par un rêve, à moitié patriotique, à moitié aventureux. Le Tennesseeien se voyait le libérateur du Sonora, un état Mexicain qui comprenait une partie de ce qui est aujourd’hui l’Arizona. C’est ainsi que, en suivant ses rêves, il envahit le Mexique en Novembre 1853, avec une « armée » de 45 hommes. Estimant qu’il ne pourrait pas prendre la garnison bien défendue de Sonora avec son armée de bric et de broc, WALKER atterrit plutôt à La Paz, en Basse Californie. Déclarant la nouvelle République de Sonora, qui incluait à la fois la Basse Californie qu’il occupait et l’ancien état de Sonora, WALKER organisa des élections où il devint lui-même président. Viva el Presidente ! Viva la Revolucion ! Viva la Republica ! Vive le Général Alcazar ! A bas le Général Tapioca ! Il s’occupa un peu des affaires d’état dans sa nouvelle république, puis WALKER décida de fomenter un plan d’invasion de l’ancien état du Sonora. Incapable de traverser le Golfe de Californie à cause du manque de bateaux, son armée de vagabonds se mit en route vers le nord, à travers les territoires Indiens. Après ce qui s’avéra une marche désastreuse, WALKER se rendit avec ce qui restait de son armée, le 8 Mai 1854, aux autorités américaines sur la frontière internationale. De retour en Californie, en automne 1854 et grâce au plaidoyer émouvant de son avocat, WALKER fut déclaré innocent du chef d’accusation de violation des lois sur la neutralité. « Nos Pères Pèlerins sont arrivés dans un pays sauvage, ils l’ont sauvé des sauvages et ils en ont fait un havre de civilisation » dit l’avocat loquace. « Pourquoi WALKER n’aurait-il pas le droit de faire la même chose pour le peuple oppressé du Sonora ? » Huit minutes et demi après que l’affaire fût en délibéré, le tribunal revint avec un verdict « Non coupable ». L’échec de son escapade aventureuse et l’acceptation de ses actions par le public, voire même son approbation, aiguisèrent l’appétit de WALKER et le poussèrent à faire quelque chose d’encore plus grand.Sa prochaine aventure, l’invasion, l’occupation et son élection à la présidence du Nicaragua, serait le point culminant de sa courte vie. Le Nicaragua était mûr pour la révolution. Des dissensions internes et une lutte pour le pouvoir entre plusieurs petits chefs indigènes avait littéralement déchiré le pays en morceaux. WALKER tira avantage de la situation, mais cette fois, il fit les choses légalement. A la fin de 1854, WALKER signa un contrat avec le gouvernement en place au Nicaragua qui lui permettait de faire entrer dans le pays 300 colons devant occuper une concession de 50 000 acres. En retour, les Américains devraient faire leur service militaire, mais toucheraient une compensation mensuelle. Pour être certain que l’opération serait absolument légale, WALKER fit signer les papiers par le U.S. District Attorney de San Francisco, c’est-à-dire le Procureur, et par le Commandement de la Division du Pacifique de l’Armée des Etats Unis. Avec la bénédiction de son gouvernement, WALKER et 56 de ses camarades quittèrent San Francisco et le 1er. Juin 1854, son navire, le « Vesta », déchargea les hommes et leur équipement dans le port de Ralejo au nord du Nicaragua. Qui a dit que l’Amérique n’était pas un pays impérialiste ? Entre la Guerre du Mexique et celle contre l’Espagne, sans oublier les petites guéguerres de la fin du dix-neuvième siècle et au début du vingtième, à Cuba, dans les Philippines ou en Chine, ces aventures Sud-Américaines rocambolesques ne sont pas surprenantes.WALKER et ses hommes furent immédiatement intégrés à l’Armée Nicaraguayenne. Sa première mission fut d’occuper la ville toute proche de Rivas, tenue par l’une des factions rivales. L’armée des Américains de WALKER fut augmentée de 100 soldats réguliers Nicaraguayens, qui désertèrent immédiatement dès que les combats débutèrent. C’est ainsi que WALKER et son armée de 56 têtes firent face à une garnison de 500 hommes armés. Après une bataille qui dura plusieurs heures et qui se termina par des pertes ennemies de 200 soldats comparés aux 11 Américains, les hommes de WALKER évacuèrent la ville. Bien que ce fût une défaite technique pour WALKER, l’histoire aurait très bien pu être une victoire, si ce n’est à cause de la trahison de l’un des Généraux Nicaraguayens qui avait alerté la garnison de Rivas de l’arrivée imminente des Américains. Après plusieurs jours d’escarmouches, dont la plupart furent gagnées par l’armée de WALKER avec un taux de perte étonnamment faible pour les Américains, il marcha sur Granada, la capitale du pays. La cité se rendit immédiatement, et le « Général » WALKER fit une entrée victorieuse dans la ville. « Viva el Presidente ! Viva la Revolucion ! Vive le Général Tapioca ! A bas le Général Alcazar ! Non, c’est le contraire, je ne sais plus, ils changent tout le temps… »

Au cours des mois qui suivirent, WALKER consolida son pouvoir au point de devenir l’individu le plus puissant et le plus respecté du pays, malgré qu’il n’eût aucune autre fonction que celle de chef de l’armée. En Juin 1856, on tint de nouvelles élections, des élections qui alignaient trois « politicos » autochtones contre WALKER pour l’enjeu de la présidence. Sur 23 000 votes exprimés, William WALKER en réunit 16 000, et devint ainsi le Président légitime du Nicaragua. Les capacités politiques de WALKER n’étaient pas aussi bonnes que ses prouesses militaires et, comme il avait décrété plusieurs réformes déplacées, sa popularité commença vite à se faner. Les armées de plusieurs pays d’Amérique Centrale envahirent le Nicaragua en Septembre 1856, et ce n’est seulement après que les citoyens se rendirent compte que WALKER était le moins mauvais des diables, qu’ils arrivèrent à sa rescousse et retardèrent l’inévitable de quelques mois. Pendant ce temps, les problèmes avec les intérêts financiers américains en Amérique Centrale commencèrent à faire de plus en plus d’ombre au dessus de la tête de WALKER. Dans son escalade vers le haut, il avait marché sur les doigts de pieds de gens puissants. L’un de ses plus ardents ennemis était le Commodore Cornelius VANDERBILT. Un gros investisseur dans une grosse compagnie dont l’objectif était de construire un canal à travers le Nicaragua, VANDERBILT avait perdu plus d’un million de Dollars dans le tumulte et le chaos qui frappèrent le régime en place lorsque WALKER fit son coup. Et puis, si VANDERBILT n’avait pas été un adversaire de poids, le Nashvillien se retrouvait aussi avec le Gouvernement des Etats Unis aux trousses, pour violation des lois de neutralité. Et vas-donc au charbon, en Juin 1854, tout le monde était d’accord. Deux ans et demi après, il est persona non grata. Quand tu seras en haut, je te ferai bien glisser en te mettant des peaux de banane sous les godasses pour te laisser tomber ! Je crois plutôt qu’il n’avait pas pigé que l’autre gros con et son gouvernement voulaient annexer le pays pour pouvoir prendre les dividendes du passage par le canal tout en ayant une plate-forme stratégique. C’est d’ailleurs ce qu’ils ont fait juste après avec Panama. Mais ce crétin d’ancien toubib devenu avocat puis journaliste avant d’être aventurier et candidat président voulait le gâteau à lui tout seul, ce salaud. Washington disait que WALKER n’avait aucun droit de se trouver au Nicaragua pour commencer, et encore moins d’en être le Président ! La déception constante du peuple Nicaraguayen avec ses politiques, la position du gouvernement des Etats Unis sur son rôle dans une intervention sur les affaires intérieures d’un pays ami, sans parler de la mauvaise publicité qu’il se faisait dans la communauté financière, tout se réunit pour précipiter le Président WALKER dans sa chute. En Mai 1857, il démissionna de sa fonction. Marqué officiellement comme un renégat par Washington, le Président WALKER fut accueilli en héros à son retour aux Etats Unis. Il visita plusieurs villes, faisant des discours, et recevant en retour les clés des villes et regardant des parades données en son honneur. En Novembre 1857, WALKER fit une tentative osée pour rejoindre le Nicaragua. Encerclé par un bataillon de 300 U.S. Marines, WALKER se rendit au Commodore Hiram PAULDING et fut à nouveau renvoyé aux States. Toujours en héros, il attisa la question de l’Amérique Centrale en déclarant que l’U.S. Navy avait violé l’espace Nicaraguayen lorsqu’elle l’avait arrêté, car il était en fait le Président en exil de la République où tout s’était passé. La réaction de l’opinion publique américaine fut telle que le Ministère de la Marine fut officiellement réprimandé et que toutes les accusations retenues contre WALKER furent retirées. Plusieurs autres tentatives de re-capturer le Nicaragua étouffèrent toutes dans l’œuf. Finalement, en 1860, alors qu’il se prélassait dans le succès de son livre qu’il avait récemment publié, « The War In Nicaragua », WALKER essaya une nouvelle fois. C’est un peu comme les politiques de chez nous. Une fois qu’ils sont en place, plus moyen de les déloger, et quand on y arrive enfin après qu’on ait réussi à les faire passer devant un tribunal pour avoir fait du fric avec du sang contaminé au sida par les drogués et les pédés, ils reviennent dès qu’ils ont rechargé les batteries. A croire que le pouvoir, c’est de la drogue. Accompagné d’un petit contingent de soldats, il débarqua au Honduras, d’où ils avaient l’intention de voyager à travers les terres jusqu’au Nicaragua. Après avoir pris la ville portuaire de Trujillo, WALKER se retrouva cerné de toutes parts, sans avenue pour s’échapper. La fin était proche. Il se rendit aux autorités Britanniques qui avaient promis de le laisser passer s’il arrêtait le combat. Au lieu de cela, il fut immédiatement livré au gouvernement Hondurien. Le 12 Septembre 1860, au milieu d’une foule ricanante et moqueuse de Honduriens, William WALKER fut exécuté publiquement. Ca, ça ne m’étonne pas de la part de ces tordus d’angliches. C’est bien eux. On ne peut jamais leur faire confiance. Faux-frères. Fidèles à leur réputation de traîtres.

Après nous avoir fait la guerre pendant cent ans, après nous avoir méchamment brûlé une brave petite pucelle innocente qui voulait juste qu’ils retournent chez eux parce que chez nous, ils avaient rien à foutre, après avoir mis des bâtons dans les roues à tous leurs voisins pendant des siècles, dont la France principalement, après avoir abandonné nos pères aux Stukas sur les plages de Dunkerque et massacré notre Marine à Mers-el-Kébir, après avoir gêné par tous les moyens qu’ils trouvaient tout ce qui a pu contribuer à l’élaboration du Marché Commun, après avoir importé des ratagasses à pleins containers entiers à ne plus savoir qu’en foutre d’autre que leur filer des aides sociales et des allocations payées par la communauté pour qu’ils achètent des Kalachnikov avec avant de les faire envoyer à leurs frères qui sont restés faire la guerre chez eux, après avoir buté leur propre princesse chez nous pour nous accuser, alors qu’elle avait un polichinelle égyptien dans le tiroir qu’il était inconcevable de laisser prendre un jour la couronne d’Angleterre, ils nous ont encore empoisonné il n’y a pas longtemps au Kreutzfeldt-Jacob et ils ont coûté une fortune à la C.E.E. avec leur vache folle et leur fièvre affreuse qu’ils importent de l’autre côté du monde par une transaction contraire au principe de l’Europe. Et ces connards d’amerloques les prennent toujours pour leurs « cousins » ! L’une des plus grandes ironies de tout l’épisode William WALKER est le fait que, juste quelques années après sa mort, son ennemi le plus farouche, ce Cornelius VANDERBILT qui joua un rôle si important dans sa chute, fit don des fonds nécessaires pour construire un collège dans la ville natale de WALKER, Nashville, Tennessee. Il n’y a pas de doute que VANDERBILT avait déjà oublié le temps des ses aventures avec la compagnie du canal en Amérique Centrale, et on peut supposer que tout souvenir de William WALKER avait disparu lui aussi. Mais de nos jours, l’héritage du Commodore est présent dans l’existence de l’Université Vanderbilt, alors que seule une petite marque historique montre la maison qui vit l’enfance de William WALKER, ce petit homme qui, pendant quelques mois, avait tenu le destin de toute l’Amérique Centrale entre ses mains.

Bon, première constatation. Il ne s’agit déjà pas du fameux Texas Ranger WALKER qui donna son nom au célèbre revolver pondu par Mr. Samuel COLT, d’autant plus que ce WALKER-là avait laissé sa peau au Mexique pendant la guerre de conquête que firent les Etats Unis dans la plus pure des politiques impérialistes, et à l’époque de notre petite aventure au Nicaragua, ses os étaient déjà blanchis depuis longtemps par les vautours, les vers et les insectes. Mais toute cette histoire, qui a sûrement eu mille fois son corollaire depuis avec des acteurs américains ou russes et dans d’autres pays, pourrait être française. Elle rappelle étrangement celle de Robert « Bob » DENARD avec ses histoires d’arabes et d’africains, comme le coup d’état qui avait foiré au Dahomey car « donné » depuis la métropole, et ceux des Comores, où l’aventurier fonçait à chaque fois avec la bénédiction cachée des salauds hypocrites chefs de son propre gouvernement. Et si vous vous faites prendre, on ne vous connaît pas. Vous n’avez pas droit à l’échec. Cette cassette se détruira toute seule dans les secondes qui suivront sa fin. Sauf les fonctionnaires narvalos qui loupent leur coup, tellement facile, d’essayer de faire couler le Rainbow Warrior, ou en laissant des traces trop grosses pour que ce soit vraiment un oubli, dans cette histoire sordide d’une certaine paillote qu’on a cramé sur la côte Corse. Ceux-là ont quand même eu le droit de se faire oublier, plutôt que de se faire pendre ailleurs ou couper la tête. On n’est pas des sauvages, tout de même. Mais c’est malheureusement ce qui est arrivé à WALKER, tous les DENARD, BARRIL et autres gros BONNET ayant juste eu la chance de vivre dans un monde où les peines pour gêneurs, dont la peine capitale, n’existent plus. Au dix-neuvième siècle, on les aurait suicidé, pour qu’ils ne parlent pas. Aujourd’hui, on leur donne peut-être de l’argent, ou on les laisse essayer de vendre un livre qui n’intéresse presque personne d’autre que les romantiques et les rêveurs… Et maintenant, l’Américain qui arrive au Nicaragua se fait traiter péjorativement de « sale gringo », quand c’est l’un de ses ancêtres qui a appris à celui de l’autre le mot « Révolucion », lequel a pris depuis une signification beaucoup plus « rouge ». Ironie du sort, qui joue avec les mots… Mais faut dire que l’Amérique Centrale est quelque chose de fou. On se rappelle encore la Guerre du Foot de 1971 entre le Salvador et son voisin, une guerre qui a démarré à cause d’un match de foot qui avait fait déborder le vase de sois-con. Mais qui est-ce qui fait vraiment la politique et qui décide du sort du peuple ? Les généraux, ou bien les financiers ? Le Général ALCAZAR, ou bien Mr. VANDERBILT ?

Le prince des pistoleros

Traduction d’un article de Joe BILBY paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1986

Bill MASSIE était en train de regarder ses cartes lorsque cela se passa. Il entendit l’explosion du coup, sentit son bras s’engourdir, et leva les yeux. Il vit l’homme en face de lui tomber par terre, puis il vit Mc. CALL qui reculait au milieu d’un nuage de fumée de poudre noire, criant à tout de monde de sortir, ramenant le chien de son revolver en arrière avec son pouce et le laissant retomber en pointant l’arme en direction du barman sans que le coup ne parte, le bruit vide et métallique du faux-départ le suivant jusqu’à la porte. Lorsqu’il fut parti, on ne pouvait plus rien faire d’autre que regarder la flaque de sang qui s’agrandissait sous la tête de « Wild Bill », Bill le Sauvage. Une légende était morte. Vive la légende.

Cette légende était née sous le nom de James Butler HICKOCK, le 27 Mai 1837, à Homer, Illinois. Comme beaucoup de jeunes hommes de sa génération, HICKOCK brûlait du désir d’aller vers l’Ouest et il partit pour le Kansas, y arrivant en plein milieu de la « guerre » entre les partisans de l’esclavagisme et ceux de l’abolitionnisme. Après avoir servi pendant un moment dans la Milice d’Etat Libre de James H. LANE, il essaya le fermage, puis dériva vers le nord et, en Juillet 1861, travaillait à la station du Pony Express de Rock Creek, Nebraska. David C. Mc. CANLES arriva à Rock Creek pour demander le paiement de l’argent qu’on lui devait chez RUSSEL, MAJORS & WADELL, à qui il avait vendu la station. Un fusil de chasse pendait en travers du pommeau de la selle de Mc. CANLES, qui menaça les occupants de la station, y compris HICKOCK. Le fait que HICKOCK s’amusait avec la maîtresse de Mc. CANLES, Sarah STULL, n’avait rien pour arranger une situation déjà explosive. Les détails de ce qui suivit ne sont pas clairs, mais HICKOCK tira et tua Mc. CANLES avec un fusil puis sortit son Colt Navy en ventilant du même coup les deux compagnons du mort, lesquels furent finis par les autres employés de la station, portant des haches et des houes. Accusé, en même temps que les autres, de ces meurtres devant les tribunaux du Nebraska, HICKOCK, également appelé parfois « Dutch Bill », Bill le Hollandais, fut relâché après avoir brillamment plaidé la légitime défense.

Bientôt, il partit pour le sud, où on avait besoin de quelqu’un qui savait tirer vite et bien au revolver Colt. Fils d’un abolitionniste qui avait tenu une station de chemin de fer souterrain, c’est-à-dire une station de métro, il y avait peu de doute pour savoir de quel côté « Bill » HICKOCK se battrait lors de la Guerre Civile. En Octobre 1861, il servait comme chauffeur dans l’armée Fédérale. Bientôt, on lui confia des rôles où il y avait plus d’action, comme éclaireur, détective de l’armée et espion. Le mois de Juillet 1865 vit HICKOCK, à présent connu sous le nom de « Wild Bill », arriver à Springfield, Missouri, comme un homme de la ville et un joueur professionnel. Springfield grouillait de toute sorte de types de la frontière et de soldats de l’Union démobilisés, aux poches gonflées de rappels de paie. Presque tous ces hommes étaient armés, et quatre années de conflit avaient submergé toute inhibition qu’ils auraient pu avoir à régler leurs disputes avec leurs armes. Le 21 Juillet, HICKOCK et un certain Davis TUTT, des copains qui s’étaient fâchés à cause de dettes de jeu, de la possession d’une montre Waltham et de l’affection d’une femme, se battirent au revolver à percussion dans le jardin public de Springfield. TUTT manqua son coup. La balle de HICKOCK frappa son ancien ami au torse et le tua, à une distance que plusieurs personnes estiment entre cinquante et cent yards. La loi était marginale à Springfield et le Lieutenant Colonel Albert BARNIZ du 2ème. Ohio Cavalry arrêta Wild Bill, qui fut presque immédiatement relâché sur caution. L’accusation initiale de meurtre réduite à celle d’homicide, HICKOCK fut acquitté après un procès de deux jours, le 5 Août, il postulat tout de suite pour le poste de Marshall de la ville, mais on le lui refusa. A part le fait d’avoir tué TUTT, la chose la plus significative qui arriva à Wild Bill lors de son séjour à Springfield fut sa rencontre avec le journaliste George Ward NICHOLS, un ancien officier de l’Union. Présenté à HICKOCK juste après le fameux duel, NICHOLS fut fasciné par ce pistolero aux cheveux longs et il interviewa Wild Bill pour un article qui fut publié dans le magazine Harpers de Février 1867. En plus de décrire le combat contre TUTT, NICHOLS donnait les détails d’une version de l’affaire Mc. CANLES qui décrivait HICKOCK presque comme un héros Homérique se débattant contre neuf hommes armés provenant du gang des « M’Kandlas », des sympathisants des Confédérés.

Selon NICHOLS, Wild Bill tua tous ses adversaires avec un fusil, un revolver et un couteau, en dépit du fait d’avoir été atteint de onze chevrotines. Le reste de l’article détaillait d’une manière adulatoire les exploits fantastiques de HICKOCK alors qu’il était éclaireur et espion pour les Fédérés pendant la guerre. Il est probable que HICKOCK, voulant seulement s’amuser avec son interlocuteur à lui raconter des histoires typiques de la frontière, n’ait pas prévu que la publication de l’article du Harpers en ferait une célébrité nationale, mais elle le fit. Le pays, soufrant d’un malaise d’après-guerre, recherchait de nouveaux héros. NICHOLS, répondant à cette demande nationale, ménagea une niche à Wild Bill dans le panthéon américain. Bien que certains des exploits relatés dans l’article de NICHOLS furent réfutés par des journalistes de la frontière, l’avis général était que HICKOCK était en fait un homme au tir rapide et précis, et que ses services pour l’Union, s’ils n’atteignaient pas les taux d’improbabilité suggérés par NICHOLS, étaient reconnus d’importance locale.

C’est sans aucun doute grâce à ce qu’il avait fait pendant la Guerre Civile, que HICKOCK reprit du service auprès du gouvernement à Fort Riley, Kansas, en Janvier 1866. Il travailla de manière intermittente pendant les trois années suivantes pour le Département de l’Intendance de l’Armée, à pister des voleurs de matériel appartenant au gouvernement et à servir aussi d’éclaireur Indien et de Deputy U.S. Marshall, c’est-à-dire flic. Le penchant de HICKOCK à attirer les journalistes le fit rencontrer Henry Morton STANLEY, le futur explorateur africain, qui couvrait totalement, et efficacement, Wild Bill pour le Democrat de Saint Louis. Après avoir rendu visite à sa famille dans l’Illinois en Avril 1869, et en convalescence suite à la blessure d’un coup de lance Indienne qu’il avait pris au cours d’une reconnaissance pour l’armée, HICKOCK revint vers l’ouest et reprit ses fonctions de Deputy Marshall, à Hays City, Kansas. En plus de ses fonctions fédérales, Wild Bill fut « élu » Sheriff du conté de Ellis par le comité de vigilance de Hays City et le conseil d’administration du conté en Août 1869. Le 22 août, HICKOCK tira sur un homme ivre qui devenait agressif et qui commençait à jouer du pistolet, et le tua. Un mois plus tard, il expédia vers ses ancêtres un autre voyou du coin appelé STRAWHUN, le Hun de paille, en réglant une histoire de bagarre de saloon. Son élection déclarée illégale par un tribunal, Wild Bill postula pour ce poste de Sheriff mais ce fut Peter LANIHAN qui l’obtint. Il quitta le poste à la fin de l’année, mais continua à exercer comme officier fédéral, arrêtant les voleurs de mules et les bûcherons qui coupaient des arbres illégalement. En Juillet 1870, HICKOCK fut attaqué par plusieurs soldats du 7ème. Cavalry dans un saloon de Hays City. Cloué au sol, il parvint à s’en tirer avec son revolver, tuant l’un des soldats et en blessant sérieusement un autre. Bien que courageux, Wild Bill n’était pas fou, et il quitta Hays City plutôt que de régler les choses avec ses armes contre plusieurs centaines de militaires de la cavalerie. Il s’avéra par la suite que ni le gouvernement, ni les cavaliers, ne daignèrent donner suite à l’affaire. Au cours de son séjour à Hays City, Wild Bill fit plus que forger sa légende. Il était très habile au revolver, ses coups étaient mortels et c’était un excellent officier de paix pour les standards de l’époque. Sa réputation d’homme de loi était maintenant fermement établie et elle le mena directement vers son emploi suivant.

Lorsque Tom SMITH, le Marshall d’Abilene, fut assassiné, le conseil municipal lui donna plusieurs successeurs mais aucun ne faisait l’affaire. Il s’adressa alors à HICKOCK, qui fut nommé au poste le 15 Avril 1871. La ville d’Abilene, terminus du « Mc. Coy’s Extension » sur la fameuse piste à bétail Chisholm qui venait du Texas, était divisée en deux par les rails du chemin de fer de la Kansas Pacific. La zone où le bétail était débarqué des wagons à Abilene formait la « Mc. Coy’s Addition ». C’était littéralement « de l’autre côté des rails ». Elle fourmillait de cow-boys, de prostituées, de souteneurs, de joueurs et de voleurs, et elle était noyée d’alcool. On sait que Wild Bill HICKOCK parvint à maintenir l’ordre dans cette « addition » pendant huit mois sans tuer personne. Pourtant, la nuit du 5 Octobre, il rencontra une bande de Texans ivres dirigée par le joueur Phil COE, qui brandissait un revolver avec lequel il venait juste de tirer. Certains historiens prétendent qu’il y avait du « mauvais sang » entre HICKOCK et COE, à propos de l’affection d’une « colombe salie ». Quoi qu’il en soit et comme COE levait son arme, Wild Bill dégaina, tira et blessa mortellement le Texan. Se retournant instinctivement, HICKOCK tira à nouveau sur un homme qui venait vers lui dans l’ombre. Malheureusement, la seconde victime de Wild Bill était son ami et l’un de ses adjoints, Mike WILLIAMS.

Pendant que COE mourait, HICKOCK, révolté par la mort de WILLIAMS, ferma tous les saloons et les bordels de la ville. Bien que les Texans, eux aussi enragés mais par la mort de COE, eussent mis à prix la tête de Wild Bill, personne n’osa la chercher. En Décembre, le conseil de la ville, dégoûté par le côté sordide du commerce des bestiaux, annonça que les « conducteurs » n’étaient plus les bienvenus à Abilene. Et comme en conséquence il n’avait plus besoin de son ancien paladin pour terroriser les rudes Texans, il réduisit les dépenses municipales en renvoyant le Marshall HICKOCK. Persuadé qu’il n’avait plus la rapidité nécessaire avec un six-coups, Wild Bill ne servit plus jamais comme homme de loi, peut-être à cause de sa vue qui baissait, un facteur qui peut avoir contribué à tirer accidentellement sur WILLIAMS, lequel fut le dernier homme à tomber devant ses revolvers. HICKOCK était âgé de trente quatre ans lorsqu’il quitta Abilene. La « frontière du milieu » sur le « Kansas sanglant » avait vécu, et la Guerre Civile était bien finie. Les Indiens, poussés plus à l’Ouest, disparaissaient en même temps que sa vue baissait. Pendant les cinq années qui suivirent, Wild Bill erra à la dérive, jouant pendant un petit moment pour un vieil ami, Bill CODY, dans un désastre théâtral qui s’appelait « Les Eclaireurs des Prairies ». Malheureux et comme CODY n’arrivait pas à s’adapter au « show business », HICKOCK s’en revint vers l’ouest, sans passer par le Kansas qui se civilisait de plus en plus, et s’en fut vers le Wyoming. A Cheyenne, il reprit son vieux métier de joueur professionnel et prépara vaguement une expédition vers les Black Hills, les Collines Noires, pour y chercher de l’or, sans que l’on sache si c’était en y jouant aux cartes ou aux dés, ou en y creusant le sol. Wild Bill n’était plus le tireur au regard perçant de l’époque de Hays City ou d’Abilene, mais on lui donnait encore une place de choix au sein de la communauté « sportive » de Cheyenne. En Mars 1876, pourtant, il fit un pas de plus sur le chemin de la civilisation en épousant Agnes Lake THATCHER, une veuve qui possédait un cirque et à qui il écrivait depuis plusieurs années. Agnes finança à crédit le voyage vers les Black Hills dont il parlait depuis longtemps mais pour lequel il n’avait pas l’argent, et il arriva à Deadwood le 12 Juillet. Cinq jours plus tard, il écrivait à sa femme « Je suis sûr que ça va bien se passer… » Le 2 Août 1876, à trois heures de l’après-midi, Jack Mc. CALL, un petit vagabond sans motifs apparents, s’approcha par derrière, mit son revolver contre la tête de Wild Bill HICKOCK, et laissa le chien s’abattre sur la seule bonne cartouche que contenait le barillet, en l’envoyant vers l’éternité. Ah, que voilà une bien triste fin pour un tireur d’élite et un aventurier, l’ancien éclaireur chasseur d’Indiens et de voleurs, le sheriff qui réglait les comptes à sa manière au plus grand plaisir des lâches bourgeois qui avaient trop peur de se faire flinguer et des riches avares qui ont préféré le jeter comme un malpropre une fois qu’il avait bien fait le ménage chez eux, cet homme qui voulait faire un peu d’argent pour enfin vivre paisiblement avec sa femme, et qui se fait tirer une balle dans la tête par un crétin, et par derrière, la façon la plus lâche de tuer un homme dans l’Ouest, et en plus de cela, par la seule cartouche en bon état que contenait le revolver de son assassin. Ca ne peut pas être autre chose qu’un mauvais coup du sort.

La fumée s’était à peine dissipée du saloon Number 10 et le corps du plus grand pistolero de tous les temps était à peine en terre, que les fabricants et briseurs de mythes se bagarraient déjà autour de son âme. Bien entendu, ils avaient plus de matériel qu’il n’en fallait en moyenne pour travailler avec. Contrairement à celles d’autres héros, la légende de Wild Bill HICKOCK commença alors qu’il était encore vivant, une situation qu’il partagea avec les autres cheveux longs George Armstrong CUSTER et Buffalo Bill CODY. L’article de NICHOLS avait servi de fondation à la fois pour l’élaboration et le dénigrement. En Juillet 1867 et comme HICKOCK se faisait rattraper par la littérature populaire de bas niveau, on publia « Wild Bill, the Indian Slayer », Wild Bill, le Tueur d’Indiens, dans les « Ten Cent Romances », les Romances à Dix Centimes, de De WITT. L’illustration de la couverture de ce récit, qui était piraté de l’article du Harper’s, montrait inexplicablement Wild Bill en train d’anéantir le gang des « M’Kandlas », plutôt que des Indiens. Un peu plus tard, De WITT publia « Wild Bill’s First Trail », la Première Piste de Wild Bill, une descente encore plus profonde dans la fosse d’aisance littéraire des histoires à dix sous. Malheureusement, la vérité sur HICKOCK n’a pas été très bien servie non plus par des écrivains plus sérieux. Mari SANDOZ était peut-être la plus grande artiste qui écrivît sur l’ouest Américain, et l’une des rares personnes de race Blanche qui comprenaient bien l’esprit des Indiens. Pourtant, Madame SANDOZ n’aimait pas beaucoup Wild Bill HICKOCK. Dans « Le Chasseur de Bisons », elle l’accusait, en se basant uniquement sur des on-dit, d’avoir assassiné le chef Sioux WHISTLER, le Siffleur.

William Elsey CONELLY, le premier biographe sérieux de Wild Bill, était de ceux qui n’ont pas peur de déformer les faits dans l’autre sens pour insérer son héros à une époque et un lieu convenant plus à l’histoire qu’il écrivait. CONNELLY n’avait pas peur non plus de publier comme véritables, et sans les vérifier, des anecdotes qu’il récoltait auprès des hommes de la frontière prétendant avoir connu HICKOCK. Le livre « Wild Bill HICKOCK de Richard O’CONNOR, publié en 1950, avait mit les biographes à l’œuvre mais reprenait un certain de nombre de mythes lui aussi, y compris la légende disant que HICKOCK avait guidé le Sénateur Henry WILSON dans un tour sur l’Ouest en 1869. O’CONNOR acceptait lui aussi l’assertion que le combat de HICKOCK avec les cavalier de la 7ème. en 1870 avait été commanditée par le Capitaine Thomas CUSTER, le frère de « cheveux longs » CUSTER et qui allait mourir avec lui à Little Big Horn, qui aurait utilisé ses hommes pour assouvir une rancune personnelle qu’il aurait eu avec Wild Bill. S’il y avait eu la moindre raison valable pour Tom CUSTER d’entretenir quelque animosité contre HICKOCK, il n’en existe pas la moindre trace historique. Il est également improbable que CUSTER, qui avait reçu deux fois la Médaille d’Honneur pendant la Guerre Civile, ait hésité à régler lui-même l’affaire avec Wild Bill s’il eût senti qu’il avait des raisons de le faire, encore qu’il y ait un doute considérable, dans l’esprit de cet auteur, qu’il eût survécu à une telle rencontre. Quatre vingt huit années passèrent entre le moment où le corps de James Butler HICKOCK gisait sur le plancher sale du saloon Number 10 et une biographie précise et définitive. Il est intéressant de noter qu’elle fut écrite par un Anglais, Joseph G. ROSA. Le portrait du meilleur tireur de la frontière, They Called Him Wild BillOn l’appelait Wild Bill, fut brossé par ROSA avec le talent méticuleux d’un recherche sérieuse, et d’une bonne connaissance des armes du XIXème. siècle. Il ne semble pas que quelqu’un d’autre fera un jour une meilleure étude de HICKOCK. ROSA n’a pas seulement fait exploser les vieux mythes et recherché des faits nouveaux, mais sa connaissance des armes lui a permis de faire des hypothèses sur les armes à feu que Wild Bill a probablement utilisées, tout comme sur son habileté à les utiliser. Bien que les éléments de preuve disponibles indiquent que HICKOCK pût avoir choisi, à la dernière année de sa vie, des revolvers à cartouches métalliques, dont des conversions en .38 Colt à partir de revolvers à percussion, il y a peu de doute que tous ses exploits au tir ont été accomplis avec des revolvers utilisant des capsules et des balles rondes, très probablement des colt Modèles 1851 Navy. La carrière de gunfighter, celui qui se bat avec des armes à feu, de Wild Bill commença en 1861 et dura jusqu’en 1871, quand il rangea ses revolvers. Il est certain que HICKOCK n’utilisa jamais au combat le fameux Colt « Peacemaker », mis sur la marché en 1873, et il est probable qu’il n’en posséda pas un de sa vie. De ses propres aveux à NICHOLS, Wild Bill tira sur Mc. CANLES avec un « Hawkins » à Rock Creek. Les fameux fusils « Hawken » fabriqués par les frères Jake et Sam HAWKEN à St. Louis étaient des armes de gros calibre, en moyenne du .53, solidement faites, au fût demi-long, et populaires parmi les hommes des montagnes et les autres hommes de l’Ouest avant la Guerre Civile. Le terme Hawken, très souvent mal utilisé et dit Hawkin ou Hawkins, devint, à l’époque et encore aujourd’hui, un terme générique pour tous les fusils à demi-fût en gros calibre. On utilisa une photographie de l’un de ces fusils génériques « Hawkins », provenant de la collection du Nebraska Historical Society, pour illustrer un récent article sur HICKOCK, et on y dit que c’était l’arme qui tua Mc. CANLES. Il n’y a cependant pas d’autre indication sur la provenance du fusil. Bien que Mc. CANLES fut tué par une arme d’épaule, la célébrité de Wild Bill provient de son habileté à l’arme de poing. Il raconta à NICHOLS qu’il avait utilisé un Colt Navy en calibre .36 à Rock Creek, après avoir posé son fusil. Le Colt Navy était une arme extrêmement populaire sur la frontière, et on la considérait comme suffisamment puissante pour l’auto-défense, tout en étant assez légère pour qu’on pût la porter dans un étui à la ceinture. Ce fut la première arme pratique à combiner ces deux qualités. HICKOCK portait une paire de ces revolvers, d’abord dans des étuis et plus tard simplement passés dans une large ceinture qu’il passait autour de ses reins. Les crosses de ses revolvers étaient dirigées vers l’avant, permettant de les saisir d’une main ou de l’autre, une particularité qui lui sauva apparemment la vie lorsqu’il se battit avec les deux soldats du 7ème. Cavalry. Wild Bill parvint à dégager sa main gauche et put tirer sur les deux hommes. Bien qu’il semble qu’il fût un peu ambidextre, HICKOCK portait deux revolvers, tout comme beaucoup d’hommes armés à l’époque de la percussion, de façon à disposer de douze coups sans recharger, une opération qui prenait du temps même si on avait des barillets séparés, déjà chargés. On dit que, lorsqu’il fut Marshall à Abilene, HICKOCK était un véritable arsenal ambulant, portant en plus de ses revolvers, deux Deringers Williamson à un coup et un fusil de chasse double à canon scié.

Wil Bill aimait les crosses en ivoire sur ses revolvers, une préférence qu’il partagea au vingtième siècle avec l’expert en revolvers Elmer KETIH. Bien que l’ivoire, à cause de son prix, soit rarement vue sur des armes modernes, il n’y a rien qui puisse égaler cette sensation mélangée de douceur et de solidité dans la prise en main d’un revolver à simple action. Les crosses en ivoire contribuent aux qualités de tir d’un revolver, et elles ne sont pas de la simple cosmétique comme celles en nacre, qu’un autre amateur de crosses en ivoire, le Général PATTON, disait qu’elles étaient juste pour les « maquereaux ». On connaît un revolver Colt Navy aux crosses en ivoire, gravé « J.B. Hickock 1869 » sur le haut de la carcasse, qui est censé avoir survécu à HICKOCK. On a dit que ce revolver, tout comme son pendant qui manque d’ailleurs, furent offerts à Wild Bill par le Sénateur WILSON en 1869 et, selon le biographe O’CONNOR, furent « …les armes aux poignées blanches qu’il porta jusqu’à la fin de ses jours. » Il semble que le fait soit inconnu de O’CONNOR, mais HICKOCK portait des « armes aux poignées blanches » avant 1869, et ROSA dit qu’il ne rencontra jamais WILSON. Le célèbre photographe de la Guerre Civile Alexander GARDNER, prit une photo d’un groupe d’hommes à Fort Harker, Kansas, en Septembre 1867. L’examen de ce cliché montre clairement le Deputy Marshall HICKOCK portant une paire de revolvers aux crosses en ivoire, enfoncés dans leur étui et crosses pointant vers l’avant. O’CONNOR fut responsable d’avoir raconté plusieurs histoires fantaisistes sur les armes de HICKOCK. Il écrivit que Wild Bill « …préférait le Colt .44 à double action. » C’est là une affirmation intéressante, tout spécialement si on considère que Colt ne produisit pas de revolver à double action en .44 avant 1878, deux ans après la mort de HICKOCK. Par contre, il y a un revolver à double action Belge, une copie du Beaumont-Adams Anglais en .45, dans la collection de la Société Historique l’Etat du Kansas. Cette arme fut offerte à la société comme une pièce ayant appartenu à HICKOCK, mais il n’existe pas de document qui puisse le certifier. L’histoire que O’CONNOR tire peut-être le plus par les cheveux, et avec le Wild Bill, il y avait de quoi vu la longueur de sa chevelure, concerne une arme qu’il décrit simplement comme « un Colt portant le numéro de série 139345 », qu’un homme du nom de Fred SUTTON aurait acheté à Pat GARETT. Selon SUTTON, l’arme aurait été donnée à GARETT par la sœur de HICKOCK, Lydia, une histoire pour laquelle il n’y a pas la moindre preuve. On dit que GARETT utilisa l’arme pour tuer Billy le Kid en 1881. Si l’arme avait été un Colt Navy, le numéro de série l’aurait placé dans la production de 1864. Cependant, il est extrêmement peu probable que GARETT ait fait face à Billy le Kid avec un revolver obsolescent alors que l’usage de revolvers à cartouches métalliques était universel au soin des tireurs sérieux. Et s’il s’était agi d’un Colt Single Action Army, le numéro de série l’aurait daté de 1892, ce qui se passe de commentaires. On peut penser que HICKOCK utilisa d’autres revolvers que des Colt Navy. On l’a vu faire une démonstration de tir au début des années 1870 pendant qu’il voyageait avec CODY, où ses revolvers étaient des Colt et Remington en .44. Il pouvait s’agir de revolvers à percussion, des Colt 1860 et Remington 1863, ou bien les mêmes armes converties aux cartouches métalliques. Les deux grands fabricants convertissaient leurs armes à percussion aux cartouches à cette époque, et Colt mit son premier revolver à cartouche métallique sur le marché en 1871. Un certain nombre d’armuriers privés répondaient également à la demande du public et convertissaient des armes à percussion dans leur propre atelier. C’est donc que les armes de ce type étaient relativement communes. Il faut noter toutefois que Charles GROSS, qui connut HICKOCK à Abilene, disait, en parlant des cartouches métalliques, que « Bill ne voulait pas les utiliser ». En 1960, ROSA, qui préparait son manuscrit sur HICKOCK, correspondit avec le père du tir moderne de combat américain, Jeff COOPER, au sujet des possibilités de précision des revolvers à capsules et à balles. COOPER, que HICKOCK intéressait en tant que pionnier du « tir pratique », fit faire une série de tests au stand du Eaton Canyon Muzzle Loader’s Association, l’Association des Arquebusiers d’Eaton Canyon, à Pasadena, Californie, et en publia les résultats dans le numéro de Mars 1960 du magazine Guns & Ammo. COPPER se fit assister par une équipe de tireurs du club d’Eaton Canyon, qui apportèrent leurs propres armes. Nom de Dieu, çà, ça devait être bien ! Chez nous en France, les gens qui tirent à la poudre noire sont considérés comme des rigolos par les tireurs classiques, faut dire qu’il y a beaucoup de rigolos, et chez les Arquebusiers, on se prend la tête avec des histoires de points…Toutes ces armes étaient des originales en excellent état de tir, et comprenaient une paire de Colt Navy 1851 en .36, une paire de Colt Army 1860 en .44 et un Remington Army en .44. Chaque revolver fut chargé avec des balles rondes sur 25 grains de FFg dans les calibres .36 et 35 grains du même carburant dans les .44.

Ces charges se rapprochaient des charges réglementaires des années 1860. En reprenant une liste d’exploits attribués à HICKOCK et fournie par ROSA, l’équipe de COOPER dissipa des années de foutaises imposées au public par des générations d’écrivains naïfs ou dupes, et qui n’avaient pas la moindre notion de ce que c’est que le tir. COOPER démontra que des histoires aussi invraisemblables que celle qui est racontée par NICHOLS, où HICKOCK aurait mis « six balles dans un cercle qui n’était pas plus grand qu’un cœur humain » à cinquante yards « sans viser avec ses yeux », étaient pratiquement « impossibles à réaliser compte tenu des circonstances »Ca, c’est sûr ! Quand on a des tireurs sportifs qui font des 100 sur 100 à vingt cinq mètres en Mariette ou en Colt lors des concours, ce sont de sacrés champions. Et encore, un 100, c’est exceptionnel. Au Mariette, je n’en ai jamais vu faire de mes yeux, mais je sais que ça existe puisqu’on en voit de temps en temps sur les palmarès. Généralement, on trouve plutôt des 97 ou des 98. Et là, c’est à bras franc, dans le calme, et surtout en visant. Et cinquante yards, ça fait un peu moins de quarante six mètres, pas vingt cinq. Quand on connaît les faibles qualités balistiques de la boule de plomb, on peut commencer à réfléchir sur la précision à une telle distance. Un 100 à vingt cinq mètres représente dix coups dans un cercle de six à sept centimètres, et tout ce qui est entre 90 et 100 veut dire qu’il y a des 9, c’est-à-dire une zone qui est un tout peu plus grande qu’un cœur humain. Alors, six coups dans le 9 à quarante cinq mètres sans viser et dans le stress du combat, moi, je voudrais bien le voir ! De tous les témoignages sur les prouesses de Wild Bill au tir, le plus crédible est celui de Robert A. KANE, qui écrivit deux articles au début du vingtième siècle en donnant des détails sur un spectacle qu’il avait vu au début des années 1870. Tous les tours d’adresse que relata KANE, y compris toucher des briques de la hanche à quinze yards et faire rouler une boîte de conserve de quatre quarts en tirant de chaque main à dix yards, sont possibles et peuvent être réalisés par un tireur bien entraîné au revolver. Aussi important que fut l’article de COOPER, il passa inaperçu des auteurs de scénarios, à une époque où les écrans de télévision étaient inondés de westerns. L’auteur se rappelle encore clairement Huge O’BRIEN, incarnant un Wyatt EARP tout propre et rasé de près, disant à l’un de ses compagnons qu’il était capable de « caresser » le crâne d’un homme à cinquante bons yards avec son Buntline Special, une arme totalement mythique. Ah, oui ! Le Buntline. Ce truc au canon démesurément long, attribué à un certain Ned BUNTLINE qu’on ne connaît pas autrement comme armurier, peut-être était-ce un propriétaire, un écrivain ou un metteur en scène de la Belle Epoque, et avec lequel cela doit être pratiquement impossible de tirer correctement d’une main ou autrement qu’avec une crosse rajoutée. D’autant plus que les traces les plus anciennes qu’on ait d’un Buntline datent de Janvier 1881 sous la forme d’une simple lettre, pas une arme, et que tous les Colt Buntline connus portent des numéros de série qui les datent de 1907 pour les plus vieux. De tels portraits irréalistes d’hommes et sur la précision de leurs armes, combinés avec le mythe du « fast draw », l’histoire où c’est à celui qui dégainera le plus vite, un autre mythe issu tout droit de Hollywood, ont donné une fausse impression de l’Ouest américain à toute une génération, sinon plus. La confrontation classique de deux adversaires dans la rue d’une ville de l’Ouest fut le produit de l’imagination de scénaristes de Brooklyn. Je lis bien Brooklyn, et pas Hollywood. Or, Brooklyn, c’est à New York sur la côte Atlantique, et Hollywood c’est à Los Angeles, de l’autre côté du continent, sur la côte Pacifique. L’auteur américain se serait-il trompé, ou alors ma culture cinématographique serait si pauvre que çà ? Peut-être que les scénarii de l’époque s’écrivaient dans les mansardes des quartiers pauvres et qu’on allait ensuite les jouer sous le soleil de la Californie, pour oublier la tuberculose et les bagarres de rues entre  juifs, Italiens, Irlandais et nègres ? Mais le combat de HICKOCK contre TUTT dans le parc peut très bien avoir donné naissance à ce mythe. Jeff COOPER nota qu’aucune personne contemporaine de HICKOCK n’avait jamais décrit quoi que ce soit sur sa manière de dégainer rapidement, à part le fait qu’il était « vite ». La conclusion de COOPER était qu’un bon tireur de l’Ouest au XIXème. siècle avait besoin d’être assez rapide à mettre son arme en action, il devait savoir s’en servir avec précision et il devait être animé à la fois de la grâce sous pression et d’une disposition à tuer son adversaire sur-le-champ. Si c’est Jeff COOPER qui dit çà, c’est obligatoirement vrai. Le mec a servi dans l’armée pendant plusieurs guerres et avec les Forces Spéciales.Dans le métier de tireur, la vitesse de l’éclair et même la précision du tir ne suffisent pas. Celui qui hésite à l’idée de tuer un autre être humain est perdu. Au cours de ses rencontres au face à face, James Butler HICKOCK n’a jamais hésité. Il était vraiment le « Prince des Pistoleros ». Et un tueur.

Règlement et procédures pour le tir aux canons se chargeant par la bouche

Selon le Muzzleloading Artilleryman

3, Church Street – P.O. box 550 – Winchester, Massachussets 01890

On n’a pas besoin des américains en France, on sait se servir tout seuls des armes tirant à la poudre noire, mais ce petit truc m’a bien amusé quand je l’ai lu. Ca sent la crainte du procès typiquement américain parce que l’artilleur amateur n’aura pas été raisonnable. Comme je ne suis pas un artilleur confirmé mais juste utilisateur occasionnel de petites répliques, les termes techniques pour les accessoires sont susceptibles de s’appeler autrement dans le jargon des spécialistes. Et de toutes façons, les pièces d’artillerie dont se servent les gens qui tirent avec, comme le Parrott 1864 au calibre de 3 pouces ( 76,2 Millimètres ) pour 10 livres et pesant 880 livres ( 399,17 kilos ), ou bien le Tredegar 1863 de 12 livres, ne sont pas courantes en France. Les vrais artilleurs à poudre noire pas vraiment non plus. Mais on ne sait jamais, c’est mieux que de mourir con.

GENERALITES

Les règles suivantes s’appliquent aux équipes d’artilleurs utilisant des pièces fabriquées, ou transformées, selon les standards de sécurité modernes. L’âme du canon doit être faite dans un acier non soudé, d’une épaisseur minimum de ¼ de pouce ( 6,35 millimètres ) et elle doit être capable de supporter une pression de 85 000 PsI
( soit l’équivalent de 38 556 kilos par pouce carré, ou 5 511,19 KGS par CM² ). La culasse doit être vissée et goupillée. Les culasses soudées et goupillées peuvent être d’une résistance égale, mais leur installation relève d’un travail de spécialiste et d’un fabricant compétent. Les âmes sablées ne sont pas recommandées pour le tir. La cheminée doit être usinée de manière à assurer un passage direct à travers la fonte et l’âme en acier.

ZONE DE SECURITE

Etablir une zone de sécurité de 50 pieds ( 15,24 mètres ) entre les spectateurs et le canon. Aucune personne n’est autorisée à se trouver devant la bouche du canon, et à aucun moment de la séance de tir. Seuls les équipiers ou du personnel dûment autorisé et habilité peuvent se trouver dans cette zone, entre le canon et la ligne de spectateurs.

EQUIPEMENT NECESSAIRE

Dix membres au minimum pour l’équipe. Le couvercle de la caisse à munitions ne doit pas s’ouvrir à un angle de plus de 80 degrés. Une brosse à cheminée ou accessoire de nettoyage. Une aiguille à cheminée. Un doigtier. D’épais gants de soudeur. Un sac de cuir à utiliser pour passer les munitions, et un autre sac de cuir pour le matériel d’amorçage. Un fouloir. Une éponge mouillée. Une éponge sèche. Un grattoir. Un seau d’eau. De la poudre d’amorçage. De la mèche ou de la cordelette. Un chronomètre.

PROCEDURE STANDARD A DIX ETAPES :

I ) LE NETTOYAGE DE LA CHEMINEE :

Nettoyer la cheminée en premier lieu avant tout nettoyage, chargement ou tir, en utilisant l’une des trois méthodes approuvées suivantes :

  1. Le gaz comprimé. Utiliser du gaz carbonique, de l’air ou tout autre gaz pour finir de brûler ou éteindre les points chauds. On peut également utiliser des extincteurs ou des bombes d’air comprimé disponibles dans le commerce.
  1. Un écouvillon en bronze de calibre .22, ou toute autre brosse de taille appropriée, vissé sur une tige qui s’adaptera à la cheminée.
  2. L’aiguillette d’amorçage est passée plusieurs fois dans la cheminée, en tournant pour gratter.

II ) LA FERMETURE DE LA CHEMINEE :

Fermer la cheminée en pressant dessus avec le doigt, pendant tout le temps que dure le nettoyage et le chargement de la pièce. C’est-à-dire depuis le moment où le grattoir entre dans la bouche jusqu’au moment où le fouloir ressort après avoir assis le projectile. Utiliser un doigtier en cuir ou d’épais gants en cuir pour protéger le pouce.

III ) LE GRATTAGE :

Utiliser un outil à deux pointes aiguës, reproduisant un grattoir à canon identique à ceux de l’époque. Passer le grattoir deux fois dans le canon, en lui faisant faire deux tours complets à chaque fois au fond de la culasse, pour enlever tous les restes de gargousse, de poudre et pour en raffiner les résidus. Le grattoir doit s’ajuster à l’âme du canon pour que ses pointes enlèvent les résidus facilement.

IV ) LE PASSAGE DE L’EPONGE MOUILLEE :

  1. Passer une éponge mouillée, mais pas trempée, ajustée au calibre, fixée avec un brin de laine sur un cylindre de bois au bout d’un manche qui devra dépasser au moins d’un pied ( 30,48 centimètres ) de la bouche du canon une fois au fond.
  2. Pousser l’éponge contre le fond de la culasse et faire tourner deux fois complètement. Retirer l’éponge à moitié, tourner une nouvelle fois, enfoncer à nouveau l’éponge et tourner à nouveau deux fois.
  3. Enlever l’éponge. Si des résidus de poudre imbrûlés ou de gargousse sont visibles sur l’éponge, répéter entièrement la procédure en commençant par la phase III, c’est-à-dire le grattage.

V ) LE PASSAGE DE L’EPONGE SECHE :

Après le passage de l’éponge mouillée, on suit la même procédure avec une éponge sèche qu’avec l’éponge mouillée. L’éponge sèche est lavée régulièrement et séchée avec un tissu absorbant. Le but de l’éponge sèche est d’enlever l’excès d’humidité dans le canon. S’il reste de l’eau dans le canon, la charge suivante peut laisser des résidus imbrûlés qui deviendront dangereux s’ils sont encore incandescents.

VI ) LA MISE EN PLACE DE LA CHARGE :

  1. La charge de poudre doit être préparée à l’avance. Voir Règle de Sécurité N° 2 plus loin pour la préparation des gargousses. Il ne faut pas introduire la charge de poudre dans le canon avant d’avoir laissé passer une période de trois minutes. Utiliser le chronomètre.
  2. N’ouvrir la caisse à munitions que le temps d’en sortir une gargousse. Il est interdit d’ouvrir la caisse à munitions pendant qu’un autre canon se prépare à tirer ou pendant qu’il tire, et aussi longtemps que celui-ci n’est pas déchargé.
  3. Transporter la gargousse avec la charge de poudre depuis la caisse à munitions, qui sera située à au moins 25 pieds ( 7,62 mètres) derrière le canon, dans un sac de transport en cuir. Placer la gargousse d’une main devant la bouche du canon, en portant les gants de soudeur ou d’ouvrier de fonderie.
  4. Utiliser un fouloir à tête légèrement conique de type « Mississipi », pour forcer la main à rester ouverte en cas d’ignition prématurée.
  5. Le fouloir doit être marqué de deux repères. Le premier pour indiquer la longueur devant rester hors du canon une fois la charge en place, et l’autre pour indiquer celle qui doit rester une fois le projectile mis en place sur la charge, lorsqu’on tire avec un projectile et pas à blanc.
  6. En portant les gants épais de protection, se tenir sur le côté du canon en restant le plus possible derrière la bouche. Prendre le fouloir de l’autre main, paume vers le haut et pouce ouvert pour pouvoir le lâcher en cas d’ignition prématurée. Pousser la gargousse de l’extérieur dans le canon avec le fouloir, par coups souples et courts, mais francs, sans à-coups pour éviter de broyer les grains de poudre.
  7. Dès que l’on sent que la charge est au fond, retirer la main et le fouloir. Après cinq à dix secondes, on s’assure que la charge est bien au fond, en passant à nouveau le fouloir et en s’aidant des repères sur son manche. Le fouloir se tient d’une main, pouce ouvert. A aucun moment de l’opération, autrement que nécessaire, l’artilleur se tient autre part que sur le côté du canon, et jamais juste devant la bouche.

VII ) LA MISE EN PLACE DU PROJECTILE.

  1. La procédure de mise en place du projectile est identique à celle de la mise en place de la gargousse. Le fouloir est utilisé par coups légers, souples et courts, le pouce ouvert sur le côté, d’une main et paume vers le haut, jusqu’à ce que le repère sur le manche soit visible à sa place.
  2. Comme dans toutes les armes se chargeant par la bouche et pour éviter de faire éclater le canon, il est essentiel de s’assurer qu’il n’y a pas d’espace vide entre la charge de poudre et le projectile au moment où le coup part.
  3. Lorsque le fouloir est retiré, une fois le projectile en place, on peut dégager le pouce de la cheminée.

VIII ) LE PERCAGE DE LA GARGOUSSE :

  1. Pour s’assurer de l’ignition, percer la gargousse contenant la charge de poudre en utilisant une vrille fixée à un manche. La manipulation se fait avec les gants de soudeur.
  2. La vrille ne doit pas être trop longue jusqu’à atteindre le fond de la culasse une fois enfoncée jusqu’au bout, de façon à ne pas former d’espace vide sous la cheminée.

IX ) L’AMORCAGE :

  1. L’amorçage de la cheminée dépend du type d’ignition utilisé. Les amorçages typiques sont la mèche et la poudre d’amorçage, la fusée, le pétard, l’amorce à friction, le .22 à blanc et la capsule à percussion.
  2. Si on utilise de la poudre, l’amorçage s’effectue avec un récipient d’une contenance maximum équivalente au nécessaire pour remplir la cheminée de poudre en granulation FFFg ou FFFFg. L’accessoire d’amorçage à poudre doit avoir une poignée, de sorte que la main de l’artilleur ne se trouve jamais au-dessus de la cheminée lorsque la poudre est versée dedans. Une douille de .38 ou de .45 à laquelle un fil de cuivre torsadé aura été soudé donne de très bons résultats. L’amorçage ne se fera jamais depuis une poire à poudre ou une fiole.
  3. Si on utilise des fusées ou des pétards, les artilleurs doivent se rappeler que des résidus incandescents peuvent retomber au sol après l’explosion depuis le conduit de cheminée après le départ du coup. Attention : la fusée est souvent source de raté ou de long feu, qui sont susceptibles de pousser les spectateurs, les enfants, les photographes, ou les animaux de compagnie, à avancer en dehors de la zone de sécurité.
  4. Les amorçages à friction, les capsules à percussion et les cartouches de .22 à blanc, peuvent aussi former des débris incandescents. Tous les artilleurs de l’équipe doivent porter une protection sur la tête, comme toute sorte de chapeau ou de casquette, et les spectateurs doivent rester à distance de sécurité.

X ) LE TIR :

  1. L’artilleur chargé de faire partir le coup était l’homme N° 4 à l’époque de la Guerre de Sécession. Cet homme doit crier à voix haute et distincte « Prêt à faire feu ! » ( « Ready to Fire » ), pour avertir les autres que le canon est sur le point de tirer et le chef de pièce que l’amorçage est en place. A ce cri, toutes les caisses à munitions doivent immédiatement être fermées. Le chef de pièce fait une dernière inspection rapide de l’espace en aval du canon pour s’assurer que personne, photographes, enfants, animaux de compagnie, etc…, n’est en danger et commande« Feu ! » ( « Fire ! » ). On met alors le feu à l’amorce.
  2. La poudre d’amorçage, la fusée et le pétard sont allumés avec une mèche qui est suffisamment longue pour permettre aux canonniers de rester à l’extérieur des roues. La mèche est fabriquée dans une cordelette en coton imprégnée de nitrate de potassium ou d’acétate de plomb pour lui permettre de mieux brûler en se consumant plus lentement.
  3. Si on utilise une cordelette que l’on tire pour faire partir un amorçage à friction ou pour activer une platine à percussion ou des cartouches à blanc, elle devra être assez longue pour permettre aux canonniers de rester à l’extérieur des roues et de la zone du recul.
  4. Démarrer le chronomètre juste après le départ, pour s’assurer que les trois minutes de sécurité soient bien passées avant de recharger.

RATES

Si l’amorce brûle mais le coup ne part pas :

  1. Commander « N’avancez pas, il y a raté » ( « Do not advance, the primer has failed » ). Démarrer le chronomètre si ce n’est pas encore fait. Attendre trois minutes.
  2. Quand les trois minutes sont passées, s’approcher du canon par l’avant de façon à être à l’abri du recul en cas de long-feu. Se mettre à l’intérieur de la roue en prenant garde à ne pas passer devant la bouche, et travailler en avant de l’essieu. En portant les gants, nettoyer le cheminée avec la vrille, qui ne sera tenue que par le manche. Garder la tête à l’écart de la cheminée.
  3. Lorsque la cheminée est nettoyée, ré-amorcer et recommencer toute la procédure de tir avec tous ses commandements.

Si le canon ne tire toujours pas ou bout de trois essais, chasser la charge de poudre et le projectile avec l’extincteur à CO2, en le faisant fonctionner depuis la cheminée et en les poussant ainsi dehors.

HUIT REGLES DE BASE POUR LA SECURITE

  1. La charge de poudre ne doit pas dépasser 2 onces ( 56,70 grammes ) de poudre en granulation Fg, ou 3 onces de FFA, par pouce de calibre en diamètre.
  2. Préparer les gargousses à l’avance. Utiliser un sac en plastique dont l’ouverture sera entortillée et fermée par un petit nœud. Fermer le nœud de façon à ce qu’il reste plein d’espace à l’intérieur du sac, mais que l’air retenu ne forme pas un ballon. Couper la partie de plastique qui dépasse du nœud. Envelopper ce sac dans une double couche de feuille d’aluminium. Veiller à ne pas faire éclater le sac. Le sac empêche les granulés de poudre d’être retenus dans les plis de l’aluminium. L’aluminium utilisé seul laissera souvent des imbrûlés, que l’on retrouvera dans le canon au moment du grattage. Note : La loi de l’état du Massachusetts obligeaient il y a quelques années à utiliser des gargousses qui se consumaient entièrement. Ces lois permettent aujourd’hui d’utiliser l’aluminium. Seules des équipes de canonniers parfaitement expérimentés pourront utiliser des gargousses de sacs en plastique non recouverts de feuille d’aluminium.
  1. Tous les membres de l’équipe de canonniers devront porter une protection des oreilles.
  2. Personne ne doit passer devant la bouche du canon lors de toute la durée des opérations de nettoyage, de chargement et de tir.
  3. La caisse à munitions doit être surveillée à tout moment, ou maintenue fermée. L’intérieur de cette caisse aura été auparavant tapissé d’un matériau ne faisant pas d’étincelles et non sensible à l’électricité statique, comme du bois, du cuivre, du plomb, ou autre, et la caisse elle-même doit être solide, construite dans du bois ou du métal.
  4. Il est interdit de fumer sur tout le pas de tir.
  5. Il est interdit de consommer des boissons alcoolisées sur tout le pas de tir. Tout artilleur qui montre des signes d’ébriété ou les effets d’une autre drogue, doit immédiatement être remplacé.
  6. Les projectiles doivent être fabriqués de manière à passer facilement dans un gabarit au calibre, avec la seule poussée du doigt. La longueur du gabarit au calibre est d’au moins 1,5 fois celle du projectile et son diamètre ne peut dépasser celui de l’intérieur du canon lorsqu’il était neuf.

IL FAUT TOUJOURS LAISSER PASSER TROIS MINUTES ENTRE LE COUP DE FEU ET LA MISE EN PLACE DE LA NOUVELLE CHARGE !

Ce règlement a été élaboré par le magazine The Muzzleloading Artilleryman en 1980 et 1983, écrit et édité par les membres du North-South Skirmish Association en les personnes de Matthew C. SWITLIK, Commandant de la batterie Clark, Bernard KURDT, Commandant du 120ème. Volunteers et Officier de Sécurité des Union and Confederate Volunteers, ainsi que C. Peter JORGENSEN, Artilleur.

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Le bon vieux Springfield 1842

LE BON VIEUX SPRINGFIELD 1842

Traduction d’un article de W. AUSTERMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1986

Demandez à tout groupe de collectionneurs d’armes ou d’historiens quelle fut l’arme qui exerça le plus d’influence sur le cours de la Guerre Civile, et la grande majorité citera sans aucun doute la carabine Spencer à cause de sa fameuse puissance de feu et son rôle important lors des victoires décisives de l’Union comme Gettysburg et Nashville. Quelques-uns uns de ceux qui réfléchiront un peu plus, ou ceux qui voudront installer la polémique, ne seront pas d’accord et désigneront le fatidique petit Deringer de gros calibre de John Wilkes BOOTH comme l’arme qui décida de l’issue finale du triomphe de l’Union sur le Sud. Mais on peut également avancer qu’il serait mieux de discuter sur une arme conçue pour un conflit plus ancien, dépassée bien avant les premiers coups de feu qui ont salué l’aube sur Fort Sumter. Le mousquet Springfield Modèle 1842 n’a sûrement pas tiré les coups de feu qui eurent le plus d’influence dans la bataille. Mais si ces coups n’ont pas décidé de l’issue du conflit, il n’y a pas de doute qu’il y ont été pour quelque chose sur le long chemin d’agonie que les deux camps suivirent jusqu’à Appomattox. Ce ne fut qu’une autre de ces ironies du sort impliquées dans une guerre voyant pour la première fois une utilisation intensive de canons rayés dans l’artillerie et les armes légères, de mitrailleuses et d’armes à répétition se chargeant par la culasse, qu’un mousquet à canon lisse ait eu autant d’impact sur le cours de évènements.

Entre 1843 et 1855, on produisit quelques 275 000 de ces armes à percussion en calibre .69 aux arsenaux de Harper’s Ferry et de Springfield. Une arme d’épaule pour le moins encombrante avec son poids de neuf livres et mesurant presque cinquante huit pouces de long, le modèle 1842 fut la première arme à percussion, et la dernière à canon lisse, produite pour les régiments d’infanterie de l’U.S. Army. Le modèle 1842 connut le service pendant la Guerre du Mexique, dotant les troupes régulières, bien que beaucoup de régiments de volontaires eussent du se contenter des mousquets à silex du modèle plus ancien. Comme le remarque le Lieutenant Ulysses S. GRANT : « L’infanterie sous les ordres du Général TAYLOR était armée de mousquets à silex et de cartouches en papier chargées de poudre et de balles ou de chevrotines. A la distance de quelques centaines de yards, un homme pouvait vous tirer dessus toute la journée sans que vous vous en rendiez compte. » L’arme à percussion détrôna vite le « culbuteur de citrouilles » à silex à la fin de la guerre, et le modèle 1842 rendit encore indifféremment des années de service sur la frontière à l’Ouest. Dans une compagnie d’infanterie moyenne, un coup sur six pouvait toucher une cible de la taille d’un homme à cent yards sur le stand à l’entraînement. En Juillet 1855, le Secrétaire à la Défense Jefferson DAVIS reconnut l’obsolescence du mousquet et ordonna que l’on fabriquât et distribuât une nouvelle génération de fusils à canon rayé utilisant la balle conique Minie. Les régiments de ligne furent enfin équipés d’une arme possédant une véritable précision à longue distance.

Dans toute la nation, les vieilles armes furent gardées en stocks de réserve, à la fois dans les armureries fédérales et dans celles d’état. Lorsque éclata la Guerre Civile en Avril 1861, environ 213 000 fusils Modèle 1842 se trouvaient encore sur les râteliers entre le Massachusetts et la Californie. Ce furent les armes longues les plus facilement disponibles lorsque l’on se mit à se tirer dessus de part et d’autre, et dans les premiers mois frénétiques de la guerre, les recrues s’estimaient chanceux si on leur attribuait l’un de ces « canon lisse à percussion », en comparaison avec les anciens fusils à silex qui étaient également distribués. Le Nord jouissait d’une supériorité écrasante sur le Sud en matière de capacité industrielle, mais cela allait prendre du temps avant de pouvoir le sentir. Au printemps de 1861, beaucoup de régiments de l’Union portaient le Modèle 1842 à l’épaule. Parmi eux, on cite des unités comme le 3ème. Connecticut, le 9ème. Massachusetts, le 8ème. et le 41ème. New York, et le 4ème. Volontaires d’Infanterie du Michigan. Jusqu’en Juillet 1863, le 12ème. New Jersey fit face aux charges de PICKETT à Gettysburg avec ses Modèles 1842, et tira des volées foudroyantes de balles et de chevrotines dans les rangs des gris avec des effets significatifs. La situation était pratiquement la même du côté de la Confédération. Au printemps de 1861, les armureries du Sud comptaient un total de 78 931 Modèles 1842. Sur ce nombre, 1557 ont été comptabilisés comme rayés et équipés d’une hausse réglable vers 1850.

La grande majorité des armes d’épaule tirait donc un projectile sphérique de 414 grains dans un canon lisse, avec une charge de 130 grains de poudre noire. La gigantesque balle faisait de la lumière dans tout ce qu’elle touchait, si elle touchait quelque chose aux distances de combat… En plus des mousquets de Springfield et de Harper’s Ferry, les Rebelles disposaient aussi de versions de l’arme fabriquées localement. Entre 1852 et 1853, pendant une période où les relations entre l’état et le gouvernement national commençaient déjà à s’envenimer, l’armurerie Palmetto de Columbia, en Caroline du Sud, produisit 6000 copies du Modèle 1842, très proches de l’original. Malgré l’importation d’une grande quantité d’armes depuis l’Europe, et la récupération de milliers d’autres sur les champs de bataille, la Confédération continua à doter le Modèle 1842 comme arme d’ordonnance standard. Au fur et à mesure que le temps passait, les Sudistes se rendirent de plus en plus compte qu’ils étaient en désavantage lorsqu’ils étaient confrontés aux troupes de l’Union.

Avec à sa tête le Général Josiah GORGAS, le Département de l’Equipement Militaire de la Confédération du Sud, le C.S. Ordnance Department, plein d’imagination et de ressources, prit note du problème et essaya de trouver un remède à l’imprécision du canon lisse. Le Lieutenant-Colonel William LeRoy BROUN, commandant l’arsenal de Richmond à partir de 1863, relate comment les penseurs de l’administration conclurent qu’il serait plus facile de changer le type de munition en dotation, que de rappeler tous les canons lisses et les faire rayer. « L’idée était de tirer un projectile allongé composite, fait de plomb et de bois dur, ou de papier-mâché, avec une tête en forme de fer de lance et un corps de plomb » se rappela BROUN plus tard. «  Le corps serait contenu dans un sabot creux en bois ou en papier-mâché. » La nouvelle balle était conçue sur de solides bases théoriques. « Au départ du coup, le matériau plus léger, se déplaçant plus vite, ferait ressortir la tête pointue et éliminerait ainsi la traînée » prétendait BROUN « et le vol de la trajectoire serait le même que celui d’une flèche, sans basculer sur le plus petit axe, comme si le centre d’inertie du projectile était en avant du centre de résistance à l’air. En tous cas, c’était la théorie du projectile composite conçu pour le vieux mousquet à canon lisse. » Ben mon vieux, çà c’est fort. Je connais le centre de gravité, mais le centre de résistance de l’air… Boum, et le petit bout pointu sort de son prépuce, comme sur une bite de chien. Je croyais que des hydrocéphales, il n’y en avait qu’en France, mais je vois qu’il y en avait aussi à l’époque chez ces braves Sudistes ! On élabore une théorie tellement fantaisiste et tirée par les cheveux compte tenu d’une époque où l’aérodynamique n’était même pas encore une science comme elle l’est aujourd’hui, sans parler des complications induites pour la fabrication massive de ces nouvelles balles qui auraient du voler, que les sous-idiots d’en face n’y comprendront rien, et le soldat moyen n’aura qu’à écouter aveuglément son chef qui lui répétera bêtement comment que ça marche bien, ces nouveaux trucs qu’on nous donne, maintenant ! Il n’y a pas de traces de production ni de dotation en service de cette balle exotique, mais le concept de base était très proche de celui des munitions modernes à sabot utilisées pour percer les blindages et destinées aux canons à haute vitesse armant les chars. Précis ou pas, le canon lisse vit le feu dans les rangs des gris. L’arsenal d’Augusta, Georgia, contenait 12 380 Modèles 1842 au moment de la sécession, et beaucoup de régiments d’état furent dotés de la vieille arme lorsqu’ils furent rassemblés pour le service.

Les hommes du 14ème. Georgia Infantry apprirent à manipuler et à tirer en volées avec les anciennes reliques avant de marcher au combat sous les ordres du Général Robert E. LEE et sa légendaire Armée du Northern Virginia. Les Géorgiens suivaient le Colonel R.W. FOLSOM en tant que partie d’une brigade formée par d’autres régiments de l’état, au moment où l’armée de LEE se heurta à une force Fédérale commandée par le pompeux Général John POPE. Par un pluvieux 1er. Septembre de 1862, des éléments des deux armées ennemies se rencontrèrent près du petit hameau de Chantilly en Virginie. Les Rebelles se déployèrent devant un petit relief connu sous le nom d’Ox Hill, la Colline du Bœuf, et tinrent la ligne contre les tuniques bleues qui attaquaient. Le Brigadier Général Isaac STEVENS saisit l’étendard d’un régiment de New York et mena ses hommes à l’assaut. Les Yankees chargèrent en avant à travers une pluie aveuglante, et ils étaient sur le point de percer les positions Géorgiennes quand une volée brûlante partie de leurs mousquets stoppa net leur avance et laissa STEVENS étendu dans la boue, avec un trou béant dans la tête. Héros de la Guerre du Mexique et anciennement gouverneur du Territoire de Washington, STEVENS était un personnage populaire dans le Nord, et sa mort horrifia toute la division qu’il commandait durant la bataille de Chantilly.

Les Yankees, secoués, se retirèrent et se rassemblèrent à distance des Confédérés, pendant que les renforts arrivaient sur le terrain. La division du Major Général Philip KEARNY commença à regarnir les rangs, et l’officier impétueux chercha immédiatement à frapper les Rebelles en retour. KEARNY était une sorte de légende dans l’Armée de l’Union à l’époque. Avocat millionnaire, il avait quitté le barreau pour devenir un soldat professionnel. Cavalier né, il avait servi comme observateur avec les Français en Afrique du Nord, et perdu un bras au cours d’une action héroïque pendant la Guerre du Mexique. Le Général Wilfried SCOTT disait de lui « C’était l’homme le plus brave que j’aie jamais connu, et un parfait soldat. » Le « parfait soldat » était courageux à l’extrême, et ce défaut le rattrapa sous la pluie sombre ce soir-là à Ox Hill. Il donna des éperons et fonça vers le front en ordonnant à un régiment du Massachusetts de le suivre à l’attaque. Les New Englanders pataugèrent en avant dans les restes détrempés d’un champ de maïs alors que le crachement du feu jaillit des rangs Confédérés. Comme les hommes d’infanterie hésitaient et le prévinrent qu’il y avait toute une division de déployée dans la forêt juste en face, KEARNY se mit en colère et fonça en avant sur son cheval pour les pousser à le suivre, sinon ils auraient eu honte. On pouvait discerner des silhouettes dans l’ombre pendant que le Général approchait des bois. Le Simple Soldat L.G. PERRY du 14ème. Georgia faisait partie de ceux qui attendaient en embuscade lorsque le rêche accent New-Yorkais de KEARNY se fit entendre avec cette question impérieuse « Qui est-ce qui vous commande, là ? » Une voix traînant de Géorgien répondit en lui demandant de se rendre. KEARNY fit faire demi-tour à sa monture et lui planta ses éperons dans les flancs. Il se mit debout dans les étriers et se pencha presque horizontalement sur la selle, en lançant son cheval en avant. Le Simple Soldat PERRY leva son Modèle 1842 et laissa le chien retomber sur la capsule. La balle jaillit dans une gerbe de flammes oranges, s’engouffra dans le tube digestif de KEARNY et finit dans l’abdomen. KEARNY était mort avant que son corps ne glissât de la selle. Avec deux généraux de perdus et dix pour cent des forces totales de tués ou de blessés, les hommes de l’Union se contentèrent de laisser se finir la bataille toute seule, les deux principales armées terminant une campagne qui avait déjà vu une amère défaite infligée aux forces de POPE. L’armée de LEE restait défiante, prête à asséner un autre coup à l’ennemi, lequel pleurait à présent deux personnages populaires à cause des antiques canons lisses portés par les Géorgiens à Chantilly.

Huit mois plus tard, les Sudistes faisaient face à une nouvelle invasion Nordiste quand le Général Joseph HOOKER mena l’Armée du Potomac de l’autre côté de la rivière Rappahannock, dans un vaste mouvement pour capturer Richmond. Son corps d’armée marchait à travers un sombre enchevêtrement de broussailles et sur d’étroit sentiers sinueux, appelé « La Jungle » par les Virginiens. HOOKER ramena son armée en arc de cercle s’incurvant à l’ouest et au sud, autour d’un village appelé Chancellorsville, pendant que LEE remontait rapidement en marchant le long de la rivière pour le rencontrer. Les Confédérés alignaient à peine 60 000 hommes et HOOKER 134 000, mais là, le destin était avec eux. L’un des corps d’armée de LEE était dirigé par le Général Thomas J. « Stonewall », le « Mur de Pierre », JACKSON. L’année précédente, il avait vaincu cinq armées Yankees dans la vallée du Shenandoah après une marche forcée, et jeté la panique dans Washington D.C. avant de foncer vers le sud pour rejoindre LEE dans la défense victorieuse de Richmond. A présent, JACKSON était sur le point de couronner le coup de maître de sa carrière déjà légendaire. Quelque part au milieu des pins cachés, à l’ouest des croisements menant à Chancellorsville, il avait un double rendez-vous avec l’immortalité et le mousquet Modèle 1842. Après une hâtive réunion le soir du 1er. Mai 1863, LEE et JACKSON mirent en action leur plan audacieux pour freiner l’élan de l’avance de HOOKER. Pendant que LEE emmenait avec lui une petite partie de l’armée de façon à créer une diversion sur l’avant de HOOKER, JACKSON et 28 000 hommes s’élançaient vers le sud et l’ouest dans une longue marche forcée qui les amena juste contre le flanc exposé de l’Armée de l’Union à la fin de l’après-midi du 2 Mai. Les hommes de JACKSON s’élancèrent dans le crépuscule en hurlant, des éclairs scintillant au bout de leurs fusils tout le long de leur ligne, pour piquer en avant dans les ombres à l’est, comme l’auraient fait des fers de lance. Cà, si ce n’est pas une charge à la baïonnette dans les lueurs rouges et grises du crépuscule, je m’en mords le chinois. Brandissant au dessus d’eux leurs bannières rouges en lambeaux, ils s’abattirent sur l’ennemi avec un tel élan que le 11ème. Corps de l’Union fut bientôt transformé en une foule paniquée. A la tombée de la nuit, l’armée de HOOKER s’était repliée sur elle-même comme un canif à moitié fermé, et les obus de l’artillerie Confédérée pleuvaient sur son quartier-général à Chancellorsville.

JACKSON savait que l’aube pourrait bien rapporter la victoire finale sur l’ennemi, mais il lui fallait d’abord calmer la confusion et la désorganisation qui avaient naturellement accompagné l’assaut de ses troupes. Alors que l’obscurité s’installait, il fit avec son état-major le tour du front pour remettre de l’ordre et donner de nouvelles instructions pour l’action du lendemain matin. JACKSON avait hâte de mettre en place la division de choc du Général A.P. HILL pour la nouvelle attaque, et il s’élança en avant sur son cheval, cherchant son chemin à travers les lignes pour atteindre son poste de commandement. Il était vingt et une heure ce soir-là et la pleine lune brillait à travers les reflets pourpres des feux et des fumées de poudre noire, quand JACKSON et ses aides repérèrent les postes avancés de l’Union dans la forêt et s’en revinrent pour faire sur leurs chevaux le quart de mile qui les séparait de leurs propres positions. Les sabots des chevaux frappaient le sol avec un bruit sourd sur la vieille route de planches et, comme les officiers s’approchaient du 18ème North Carolina, on entendit le cliquetis des chiens que l’on amenait en arrière au cran de l’armé. L’infanterie croyait que c’était la cavalerie Yankee qui venait vers eux. Un cri partit pour demander qui c’était, mais la réponse se perdit immédiatement dans le vacarme assourdissant de la mousqueterie alors que les armes s’allumaient tout le long de la ligne avant du régiment. Le Lieutenant George CORBETT de la Compagnie E savait que la volée tirée par ses hommes avait touché de plein fouet ce qui n’était plus maintenant qu’un nœud de chevaux et d’hommes se débattant dans l’obscurité à quelques yards à l’Est. Les baguettes de chargement cliquetaient déjà dans les canons, brisant le silence qui avait soudain suivi, pendant que les « Tarheels », les Talons de Goudron, allusion aux semelles de goudron naturel avec lesquelles étaient faits les croquenots des Sudistes, enfonçaient déjà une nouvelle charge au fond de leur Modèle 1842 et cherchaient une capsule d’amorçage dans leur giberne. Une artillerie Unioniste énervée répliqua à la mousqueterie par un feu aveugle qui envoya des shrapnels volant à travers la route, en sifflant méchamment au milieu de l’illumination de la scène par les éclatements des obus. Lorsque le bombardement s’arrêta, les aides de JACKSON et les soldats frappés d’horreur s’élançaient en courant, le portant vers un hôpital de campagne. Oh, merde ! On a buté le chef ! Merde, chef ! Mais qu’est-ce qu’on fait maintenant, chef ? On appela le docteur de l’état-major, le Docteur Hunter Mc. GUIRE, qui examina les blessures de JACKSON à la lueur d’une lampe. A trois pouces en dessous de l’épaule gauche, une balle s’était taillée une tranchée à travers le bras, y laissant dans son sillage un horrible mélange d’os éclatés et de muscles déchirés. Plus bas, dans l’avant-bras, une autre balle était entrée près du coude et était descendue pour ressortir du côté intérieur du poignet. Un troisième projectile s’était écrasé dans la main droite. Il y était encore, au milieu des débris d’os. Mc. GUIRE découpa la peau et sortit la balle. Il la fit rouler dans la paume de sa main. « Un Springfield à canon lisse » dit-il tristement « Nos propres troupes. » La balle de mousquet sonna lugubrement lorsque le chirurgien la jeta sur le plateau. Ce bruit-là fut le glas qui sonnait sur la Confédération. JACKSON laissa sur la table d’amputation son bras gauche fracassé, et mourut plus tard d’une pneumonie. Bonjour le minuscule pouvoir de pénétration de la grosse balle ronde mais, et hop, encore un manchot ! Quand c’était pas une jambe que les généraux perdaient à la guerre à cette époque, c’était un bras, parfois la tête. Et si le mec ne mourait pas de gangrène, juste après il pouvait attraper tellement froid faute de soins, qu’il y laissait la peau là aussi. Et dire qu’il y a des gens qui trouvent que la guerre, c’est bien…Tout le Sud pleurait pendant que la grande victoire de LEE à Chancellorsville était ternie par la perte de son paladin. La guerre continua, et deux mois plus tard, LEE emmena son armée vers le Nord pour envahir le Pennsylvania dans l’espoir de gagner une victoire décisive sur le sol de l’Union et de terminer ainsi le conflit en faveur du Sud. Le vieux corps d’armée de JACKSON fut attribué au Général Richard EWELL, un vétéran dégarni qui avait autrefois vu du service sur la frontière avec les dragons au Texas et au Nouveau Mexique. Un an plus tôt, EWELL avait perdu une jambe au combat. Encore un ! Qu’est-ce que je disais ? Au cours de sa convalescence, il avait épousé une veuve locale. Ces deux expériences avaient secoué et déstabilisé le célibataire quinquagénaire. Ce n’était plus le même combattant fonceur que l’armée avait connu à une époque. Lors de ses premières actions à Gettysburg, EWELL hésita avant de lancer une attaque contre les troupes de l’Union débordées et désorganisées qui tenaient Cemetery Hill, la Colline du Cimetière, quel nom bien choisi, puisque tant de jeunes et de moins jeunes y laissèrent, non pas des plumes, mais aussi des bras, des jambes, des pifs, des pafs, des oreilles, des globos, des têtes, beaucoup la vie tout court. L’assaut tardif ne fut pas lancé avec assez de détermination, et les tuniques bleues gardèrent le contrôle de la colline, donnant ainsi la bataille au Nord.

Beaucoup d’érudits prétendent que, si JACKSON avait été à la tête de ces troupes, il n’aurait pas laissé passer l’opportunité et l’issue de la bataille aurait tourné en faveur du Sud, avec un train d’évènements radicalement différent à influer sur l’histoire de l’Amérique. Ben tiens. Et si nous, les Sudistes, on avait été plus nombreux, vous les Nordistes, vous auriez perdu la guerre de Sécession qui a sèssésassésûr. En tout état de cause, beaucoup de ces morts au milieu des champs dévastés et des vergers détruits sur Gettysburg provenaient des rangs du 18ème. North Carolina, qui essayait de se racheter de sa bévue fatale de Chancellorsville. Quand, après Appomattox vingt et un mois plus tard, les derniers drapeaux furent pliés et rangés et les mousquets mis au râtelier, un certain Lieutenant CORBETT, hanté par la honte, rentrait chez lui à pied en Caroline du Nord, obsédé par le bruit d’une terrible volée qui résonnait encore dans sa tête. Pour JACKSON, STEVENS, KEARNY et des milliers d’autres, le Modèle 1842 avait stoppé net tous leurs espoirs et leur ambition, en une âcre giclée de fumée de poudre et l’impact brutal d’une balle ronde en plomb tendre. Ce vétéran aguerri qui avait servi sous deux drapeaux rentrait dans l’ombre avec eux. Mais tout en laissant sa place aux armes modernes, rayées et au chargement par la culasse, le mousquet partagea l’épitaphe que Robert E. LEE fit plus tard sur la Confédération « Nous avons perdu mais, par la grâce de Dieu, une défaite en apparence se révèle souvent être une bénédiction. »

Mousquet U.S. Modèle 1842 à percussion :

Fabriqué aux arsenaux de Springfield et de Harper’s Ferry entre 1844 et 1855 à environ 275 000 exemplaires, dont 172 000 par Springfield. Calibre .69, chargement par la bouche à un coup. Canon de 42 pouces, maintenu par trois bandes. Garnitures en fer. Pièces métalliques finition poli blanc. Baquette de chargement en acier, à tête tulipée. Tenon de baïonnette sous la bouche du canon. Crosse en noyer en dos de cochon. Platine marquée de l’aigle américain, au dessus d’U.S., devant le chien. Derrière le chien, marquée soit SPRING/FIELD/(date) ou HARPERS/FERRY/(date). Culasse marquée V/P/(tête d’aigle), parfois les initiales de l’inspecteur sont visibles. Cartouche de l’inspecteur estampillé sur le côté gauche de la crosse, de l’autre côté de la platine. Première génération de mousquet conçue aux arsenaux nationaux pour le système d’amorçage à percussion, le modèle présente d’importantes distinctions. Dernière arme U.S. à canon lisse, au calibre de .69, et première arme U.S. faite à la fois aux arsenaux de Springfield et de Harper’s Ferry avec toutes les pièces interchangeables. A part la forme de la platine, le mousquet U.S. Modèle 1842 est quasiment identique à son prédécesseur à silex, le mousquet Modèle 1840. Les spécimen qui portent les dates d’avant la Guerre du Mexique de 1847 tendent à bénéficier d’une petite plus-value. Cote de 700,00 $ à 2 250,00 $.

Mousquet U.S. Modèle 1842, canon rayé :

Transformation par rayure du canon, effectuée aux arsenaux de Springfield et de Harper’s Ferry entre 1856 et 1859 à 14 182 exemplaires au total. Même arme que le Modèle 1842, à l’exception des rayures. Un peu moins de 10 000 exemplaires furent équipés avec des organes de visée pour le tir à longue distance, les 4 182 autres n’en ayant pas. Cotes de 800,00 $ à 2 500,00 $.

Sous influence

Marche forcée dans le brouillard de l’opium

Traduction d’un article de James STREET paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1990

Le 21 Novembre 1864, le Général Confédéré John Bell HOOD sortait à cheval de Florence, Alabama, à la tête de son Armée du Tennessee. Bien que dans une grande souffrance physique, il avait gardé le commandement de ses forces pour se rendre à Nashville, la capitale de l’état du Tennessee. C’est là que HOOD se proposait d’écraser les troupes Fédérales qui étaient concentrées sous l’œil sévère du Major General Gorges Henry THOMAS, dit le « Rocher de Chickamauga », et d’inverser ainsi le cours de la Guerre Civile américaine à l’Ouest. Huit jours plus tard, HOOD, attaché à son cheval, son bras gauche n’étant plus qu’un souvenir inutile de la bataille de Gettysburg, sa jambe droite manquante depuis la bataille de Chickamauga, merde alors, ça commence bien, les généraux se sont déjà transformés en robocops super durs après avoir perdu des morceaux à travers le pays, leurs hommes qui avaient fait de même préférant être démobilisés, s’approchait du village de Spring Hill, Tennessee, à environ trente miles au sud de Nashville. Comme il l’écrivit dans ses mémoires plus tard, HOOD avait l’intention d’exécuter là « la meilleure opération de ma carrière de soldat », en isolant et en détruisant l’Armée de l’Ohio du Major General John Mc. Allister SCHOFIELD qui battait en retraite, avant qu’il pût rejoindre THOMAS. Mais tout à coup, on aurait dit que HOOD avait laissé tomber son plan. Au lieu d’attaquer les Fédérés qui marchaient péniblement le long de la Columbia Pike vers Spring Hill, HOOD, dont le credo était l’attaque, lança une série d’ordres flous et se mit au lit pour le reste de la nuit. Les Fédérés passèrent et atteignirent la ville toute proche de Franklin, un peu plus au nord, intacts. Là, ils occupèrent des positions solides. HOOD les attaqua le lendemain et ses hommes furent massacrés.

Après la campagne, le Géorgien John W. TALLEY écrivit au président Confédéré Jefferson DAVIS qu’il avait entendu des soldats dire « qu’au moins une fois, ils avaient vu la plupart des officiers supérieurs, depuis le Général HOOD jusqu’à plus bas, en état d’ébriété avancée. » Il y a fort peu de chances que HOOD ait été ivre à Spring Hill, parce que ce n’était pas un gros buveur notoire. Il est plus probable qu’il ait été sous l’influence d’opiacées. Personne ne peut déterminer avec certitude à quel point l’usage de la drogue affecta les performances des militaires pendant la Guerre Civile. Mais une chose est sûre : si HOOD était dépendant des atténuateurs de douleur, il n’était pas le seul à prendre des drogues. L’opium et l’alcool, dans leurs formes les plus diverses, étaient très prisés auprès des soldats et des officiers, et pas toujours pour des raisons médicales. On se rendit vite compte que le fait de boire de l’alcool était un problème réel chez les militaires. On utilisait très largement les boissons alcoolisées dans les armées de l’Union et de la Confédération, souvent comme médicaments, mais le plus souvent à l’excès. Donc chez nous, nos anciens paras d’Indochine ou d’Algérie, ou les anciens de l’Infanterie de Marine qui piquetaient sec quand ils sont rentrés, je veux dire ce qu’il en reste, c’est pas nouveau. Quoique maintenant, on a la relève, il y a ceux qui ont « fait » le Tchad, le Liban, la Guerre du Golfe, plus récemment le Kosovo, et puis les nouveaux, ceux qui auront été en Afghanistan. Mais ceux qui ont fait les campagnes plus récentes connaissent plus le chite ou la ganjah, avec leur sipsi ou leur chillom, que le bon vieux whisky ou la bière qui transforment le ventre en « œuf colonial ». Et les Russes qui sont rentrés d’Afghanistan étaient souvent « accros » à l’héro, tout comme leurs petits copains Américains quelques années plus tôt après un tour d’opérations au Vietnam. Sauf que là, c’était autre chose, ils étaient un peu comme des blessés de guerre, certains de leurs copains avaient eu des balles dans le corps ou des mines dans les pattes, eux ils avaient eu droit au poison que leur passaient leurs ennemis pour les diminuer. A la guerre, presque tous les coups foireux sont permis. Et il n’y a aucun doute que l’alcool représentait un problème pour les autorités, parce que l’ivresse émousse la discipline des soldats. Pour les officiers, l’ivresse pouvait coûter des vies humaines et des victoires. Mais il est presque impossible de dire après-coup si un officier était alcoolique ou pas, sauf s’il l’avouait. Un officier naval Fédéré exprima cependant l’opinion générale en disant qu’il « y a trois grands ennemis dans notre armée et notre marine… le premier c’est le whisky, le deuxième c’est le whisky, et le troisième c’est le whisky. » Le ministère de la guerre Confédéré avait une opinion similaire. Il donna des ordres en 1862 pour que tous les chefs suppriment l’ivresse par tous les moyens dont ils disposaient.

Malgré la désapprobation officielle, les menaces et les ordres, les soldats et les officiers qui buvaient continuèrent à le faire, beaucoup à leur propre détriment. Au moins dix sept généraux Fédérés et dix Confédérés terminèrent leur carrière à cause de la façon dont ils géraient leur soif d’alcool. Boire de l’alcool était considéré comme « viril » et les gros buveurs n’étaient pas rares, mais on criait honte à l’officier qui ne tenait pas l’alcool s’il buvait. Même après que le Lieutenant General Ulysses Simpson GRANT prît le commandement de toutes les armées Fédérales, avant de devenir un jour Président des Etats-Unis, sa réputation de petit buveur l’empêcha de se faire complètement accepter comme un gentleman par certains de ces confrères officiers. Le Major General Joseph HOOKER de l’Union, commandant l’Armée du Potomac de Janvier à Juin 1863, n’eut pas le succès de GRANT ni sa popularité pour diluer les effets de sa propre réputation de débauché et de buveur. Il mourut querelleur, vieux avant l’heure, se souvenant amèrement des griefs qu’il avait contre ses anciens officiers. Charles Francis ADAMS, le fils de l’ambassadeur du Président Abraham LINCOLN à la Cour Britannique de Saint-James, critiqua l’érection de la statue équestre du HOOKER juste devant l’immeuble du State House, espèce de Conseil Régional, à Boston, Massachusetts. Longtemps après la guerre, le vétéran de la Guerre Civile ADAMS fut sévère sur HOOKER dans son autobiographie : « Heureux d’avoir vu le jour au Massachusetts, il n’était à peine plus, en 1861 et à partir de cette date, qu’un militaire de West Point devenu aventurier soulard…en 1863…le quartier général de l’Armée du Potomac était un endroit où aucun homme qui se respectait n’aimait aller, et où aucune femme décente ne pouvait aller. C’était un mélange de bar et de bordel. » Il y avait les mêmes histoires dans le haut commandement Confédéré. Le Major General Benjamin Franklin GREATHAM fut accusé par le General Braxton BRAGG d’avoir été ivre lors de la bataille de Stones River, Tennessee, qui eut lieu du 31 Décembre 1862 au 2 Janvier 1863, et par le General HOOD lors de la manœuvre de Novembre 1864 à Spring Hill, Tennessee. Aucun des deux commandants ne donna de suite à l’affaire, et les accusations ne furent jamais prouvées. BRAGG, connu comme un homme qui ne buvait jamais d’alcool, releva de leurs fonctions le Major General George B. CRITTENDEN et le Brigadier General William Henry CARROLL, juste avant la bataille de Shiloh, Tennessee en Avril 1862. BRAGG énumérait la liste des fautes de CARROLL en citant « l’ivresse, l’incompétence et la négligence. » On autorisa les généraux à démissionner parce que, dans chaque camp, on préférait traiter les vices des officiers par un voile de silence. C’est seulement quand on ne pouvait plus passer outre à leur intoxication, que les officiers étaient punis publiquement. On vit un exemple flagrant de cette intoxication en service le 30 Juillet 1864, lors du siège de Petersburg, Virginia. Deux commandants de division Fédérés, le Brigadier General James Hewett LEDLIE et le Brigadier General Edward FERRERO, manquèrent d’exploiter une percée dans les lignes Confédérées alors qu’on venait de faire sauter une galerie remplie de poudre. Plutôt que de mener leurs hommes à travers le fameux « Cratère », les généraux se terrèrent derrière leurs lignes, s’apitoyant sur leur sort autour d’une bouteille de rhum. Pendant que LEDLIE et FERRERO buvaient, leurs hommes sans chefs furent encerclés dans le « Cratère » et on dénombra plus de 3 800 pertes. A travers la révolte publique qui suivit, les deux furent officiellement blâmés. LEDLIE fut autorisé à démissionner. FERRERO, commandant la seule division de soldats noirs dans l’Armée du Potomac, fut également déclaré coupable mais il ne fut pas puni. Au lieu de cela, on le nomma au grade de Major General en Décembre 1864.

Il n’est pas surprenant que l’usage et l’abus d’alcool fut tant répandu à la fois dans l’armée du Nord et celle du Sud. On trouvait facilement de l’alcool, sous toutes ses formes. Mais l’opium, rarement mentionné dans la littérature non médicale ou les rapports de la Guerre Civile, était également facile à trouver, que ce soit à l’état pur ou sous forme de ses multiples concoctions dérivées : le laudanum, le parégorique, la morphine et plusieurs médicaments connus. Les opiacés étaient vendus librement et légalement par les marchands de tous les jours, et utilisés par quiconque voulait se soulager de telle ou telle des plaies majeures qui affligeaient l’humanité. Sauf pour la connerie humaine. Là, ça ne marche pas. Ca n’a jamais marché. On devient juste drogué accro. Contre cette plaie-là, le seul remède, c’est la balle dans la tête, autant avant la came qu’après. Et, au XIXème. siècle, il y avait peu de préjugés à l’usage des opiacés. En tous cas, il est certain qu’il n’y avait pas l’équivalent du même sentiment que nous éprouvons de nos jours contre leur utilisation. On a utilisé l’opium depuis très longtemps, environ 6000 ans. C’était un composant important dans les médicaments Grecs, Romains et Arabes.

La source de l’opium, le pavot, Papaver Somniferum, était cultivé principalement dans les pays en développement. J’ai préféré « pays en développement » parce que c’est ce qu’ils sont devenus aujourd’hui, ou plutôt ce qu’il en reste. L’auteur écrit « dans les pays de civilisation naissante », ce qui n’est pas vraiment juste si l’on parle de l’Orient ou bien de l’Asie, lesquels ont connu leurs multiples civilisations bien à eux, Scythe, Egyptienne, Hittite, Perse, Indoue, Khmère ou Chinoise, pour ne citer qu’elles, bien des lustres avant que n’existât le pays de ces prétentieux d’amerloques modernes. Son pouvoir de soulager la douleur était, et il est toujours, sa plus grande contribution à la médecine. Essayez d’imaginer la chirurgie moderne sans les opiacés. L’opium était aussi prisé pour sa capacité d’influencer l’humeur et de provoquer l’euphorie. Pendant la Guerre Civile, il permettait au soldat qui s’était fait amputer de prendre de la distance avec la douleur résiduelle d’une plaie ulcéreuse ou purulente causée par le pilon, et de jouir d’un certain soulagement qui pouvait hâter sa sortie d’hôpital. Au XIXème. siècle, il n’existait pas d’analgésique non narcotique avant l’introduction de l’aspirine en 1899. On se servait des opiacés pour traiter les maux de tête, les maux de dents, la goutte, les crampes menstruelles, n’importe quelles douleurs ou maux qui sont traités aujourd’hui avec de l’aspirine ou d’autres analgésiques. Au début de la Guerre Civile, il y eut probablement quelque forme d’opium dans l’armoire à pharmacie de la plupart des foyers. Dans « La Maîtresse de la Plantation », une étude de 1982 sur la vie de la femme dans le Sud d’avant la guerre, l’auteur Catherine CLINTON écrit qu’elle trouva des remèdes domestiques, contenant tous de l’opium, contre beaucoup de maladies courantes. Elle observe : « On utilisait le laudanum très couramment pendant toute la période précédant la Guerre Civile, prescrit par fréquences néfastes pour les « maux de bonne femme »… Contrairement à l’image du vingtième siècle, le profil du dix-neuvième siècle indique que les toxicomanes se trouvaient, de façon disproportionnée, dans les hautes couches de la société du Sud, de couleur blanche et de sexe féminin. Les femmes de la famille de Jefferson DAVIS, suivie par un docteur très libéral dans ses dosages, devinrent dangereusement dépendantes. » Mais la plupart des gens qui utilisaient les opiacés ne devenaient pas des toxicomanes. Mary Boykin CHESTNUT, une figure notoire de la société Confédérée, raconta en Juillet 1861 dans son journal à Richmond, Virginia, comment elle refusa de prendre du laudanum, une teinture d’opium mélangé avec de l’alcool et de l’eau. « Je n’ai pas l’intention de me droguer maintenant » dit-elle. « Ma tête est suffisamment confuse telle qu’elle est, et mon cœur bat à en jaillir de mon corps à chaque bruit. » Plus tard, en 1865, Madame CHESTNUT fut réfugiée à Lincolnton, North Carolina. Là, on lui donna un jour par accident une surdose de poudre de Dover, un mélange d’opium et d’ipecac. Elle en dormit pendant deux jours et deux nuits. Comme le docteur lui fit remarquer qu’elle était dure à tuer, Madame CHESTNUT répliqua « Peut-être ai-je été sauvée par ce frelatage dont je me suis si souvent plainte, de tous les médicaments Confédérés. » Une fois appelés sous les drapeaux, les docteurs qui utilisaient largement des opiacés sur leurs clients civils, continuaient à les utiliser librement sur leurs patients militaires. William H. TAYLOR était aide-médecin dans l’Armée Confédérée de la Virginie du Nord, une organisation connue pour ses marches rapides. Après la guerre, il écrivit qu’il avait simplifié les motifs de se porter pâle pendant la marche, à une unique question de base :« Comment vont vos tripes ? » Sous-entendu, est-ce que vous chiez normalement ? Si elles étaient ouvertes, sous-entendu, si le mec avait la chiasse, j’administrais un bouchon d’opium. Si elles étaient fermées, je leur donnais une boule de masse bleue, un mélange composite et instable de mercure. » Du mercure ! Du poison pour donner la courante au constipé. Comme la chiasse du typographe qui manie trop de plomb. Les remèdes de l’époque donnaient donc d’autres maladies comme le saturnisme ou le cancer mais, de toute façon, le soldat était destiné à prendre du plomb dans le buffet à beaucoup plus courte échéance alors, métaux lourds pour métaux lourds, du plomb ou du mercure, c’est du kif. Un médecin Fédéré trouva une méthode encore plus rapide pour traiter ceux qui se faisaient porter pâles. Il administrait son diagnostic et son traitement depuis son cheval, distribuant de la morphine en poudre en la versant dans sa main et en la faisant lécher par le patient. Injectée par la seringue hypodermique, tout nouvellement inventée, la morphine était la forme préférée d’opium pour traiter les blessés. Et bien que les seringues fussent rares, même dans les armées les mieux équipées, on distribua 29828 onces de sulfate de morphine aux soldats de l’Union. Ce chiffre semble insignifiant comparé à aux presque 10 millions de pilules d’opium et aux 2,841 millions d’onces d’autres opiacés qui furent administrés par les autorités médicales Fédérales jusqu’en 1865.

Bien qu’il ne fût pas doué d’autant d’ubiquité du côté Confédéré, l’opium se trouva en quantités raisonnables jusqu’à la fin de la guerre, grâce aux infirmeries capturées et aux contrebandes passant à travers le blocus naval avec lequel les Fédérés avaient fermé les ports du Sud. Les opiacés furent utilisés à profusion pour traiter les maladies, mais c’est en soulageant les douleurs des blessés et en chirurgie qu’ils furent le plus efficaces. Le désir de ce soulagement fit que beaucoup de soldats devinrent des toxicomanes, car la douleur persistait encore longtemps après le traitement médical à cette époque-là. Et après la guerre, il était facile de trouver des anciens combattants qui souffrirent l’agonie toute leur vie à cause de blessures de guerre ou de maladies qu’ils avaient contractées pendant la guerre. Dans son livre « Paradis Obscur : La Dépendance à l’Opium en Amérique avant 1940 », David COURTWRIGHT cite une étude de 1868 intitulée « L’Habitude de l’Opium, avec des Suggestions pour le Remède » : « Des survivants de centaines de champs de bataille, mutilés et brisés, des soldats malades et rendus infirmes par leur séjour dans des prisons hostiles, des femmes et des mères devenues anxieuses et sans espoir à cause de la mort de ceux qu’elles aimaient, ont souvent trouvé dans l’opium un soulagement temporaire à leurs douleurs. » Pendant le Guerre Civile, autant le médecin de l’armée était-il une source pour se procurer de l’alcool à des fins non médicinales, autant il était, ou ses adjoints, une source pratique pour se procurer des opiacés, et pas seulement pour les petits chineurs, mais aussi pour des officiers de haut rang. Si un général voulait des pilules d’opium, quel était le médecin qui lui aurait refusé le soulagement qu’il recherchait, quand d’un autre côté il prescrivait le médicament de toutes façons ? Tout ce qu’un médecin avait à faire pour satisfaire une telle demande, c’était de se tourner vers son armoire à pharmacie, ou alors le patient pouvait se servir lui-même dans le stock libre qui s’alignait sur les étagères de l’infirmerie de l’unité. Le Dr. Charles Beneulyn JOHNSON, mettant par écrit les réminiscences des jours où il avait servi comme adjoint dans le service médical d’un régiment de l’Union, décrivait le contenu des armoires à pharmacie. « En campagne, nos stocks se limitaient nécessairement aux remèdes standards. » Il se rappelle « parmi lesquels on pourrait citer l’opium, la morphine, la poudre de Dover, la quinine, la rhubarbe, les sels de Rochelle, les sels d’Epsom, l’huile de castor, le sucre de plomb, le tannin, le sulfate de cuivre, le sulfate de zinc, le camphre, la teinture de fer, la teinture opii, le camphorata, le sirop de squills, le simple sirop, l’alcool, le whiskey, le brandy, le porto, le sherry, etc. Lorsque nous installions un camp où il était prévu de rester plusieurs jours, ces articles étaient déballés et posés sur des étagères provisoires faites de couvercles de caisses. D’un autre côté, lorsque arrivait l’ordre de marcher, les médicaments étaient à nouveau rangés dans des caisses, les bouteilles emballées avec du papier, etc. » JOHNSON continuait « Presque tous les médicaments se trouvaient sous forme de poudre ou en liquide. Les cachets n’étaient pas encore en usage, et les pilules étaient loin d’être aussi nombreuses qu’aujourd’hui… » Le docteur notait «…l’une des rares pilules que nous avions en stocks…était composée de deux grains de camphre et d’un grain d’opium. L’asafetida, la valériane et l’opium ou ses dérivés étaient pratiquement tout ce que nous avions pour supprimer la nervosité et provoquer le sommeil. »

Parmi les aphorismes que l’on attribue à cet extraordinaire Confédéré, mais à peine lettré, que fut le Lieutenant General Nathan Bedford FORREST, l’un dit « La Guerre veut dire combattre, et combattre veut dire tuer. » Tous les généraux de la Guerre Civile n’avaient pas une telle approche d’amalgame entre la guerre et la violence. Beaucoup préféraient essayer tous les moyens de défaire l’ennemi sans combattre. Ceux-là furent souvent les mêmes généraux qui n’arrivaient pas à contrôler le désir naturel de leurs hommes à rester où ils étaient, aussi longtemps qu’ils étaient saufs. L’historien T. Harry WILLIAMS appela ce phénomène « l’inertie de la guerre », ce moment où « l’armée du général commence à résister… lorsque toute l’inertie de la guerre en arrive à se stabiliser sur place, et que seule l’étincelle de son propre but et son esprit arrivera à la relancer en avant… un chef doit avoir dans sa trousse de secours une force mentale et un pouvoir moral qui lui permettra de maîtriser quel que soit l’événement ou la crise qui puisse survenir sur le champ de bataille. » Mais, les généraux inertes de cette guerre étaient-ils fondamentalement de mauvais chefs, ou bien est-ce qu’il y avait d’autres raisons de leurs glissades dans la faiblesse ? Lorsqu’il fit la liste de toutes les qualités qu’il estimait nécessaires à un bon général, le Maréchal Maurice de SAXE, grand esprit militaire de France du XVIIIème. siècle, présenta les classiques comme le courage, l’intelligence, etc. Puis il ajouta la santé.

Il n’est pas certain que l’issue de la Guerre Civile eût été différente si tous les généraux avaient été en bonne santé. Mais le fait est qu’ils ne l’étaient pas, et peut-être beaucoup de leurs comportements erratiques et léthargiques témoignent-ils de leur frêle santé, et de l’utilisation de l’opium, cette panacée que beaucoup de docteurs prescrivirent à tout bout de champ. Bon d’accord, ils étaient peut-être malades jusqu’à se doper à la chnoufe, mais ce n’étaient quand-même pas des petites natures ces mecs, faut avoir de sacrées couilles pour mener la charge avec un bras qui pend et une jambe qui manque, comme ce HOOD Sudiste, attaché sur son cheval avec ce moignon de merde qui devait lui faire un mal de chien à chaque mouvement, et sur un cheval au galop ça bouge, fonçant en avant sabre au clair à travers les balles adverses.

La santé de Braxton BRAGG aurait du l’exclure de toute considération pour un commandement sur le terrain. En 1861, lorsque le premier coup de feu fut tiré à Fort Sumter, près de Charleston, South Carolina, BRAGG avait déjà développé toute une longue liste de maladies chroniques, incluant la malaria, la dyspepsie, c’est-à-dire une mauvaise digestion, et des furoncles. Sa femme et ses amis savaient que, plus la pression était grande, plus il se plaignait, et plus il était enclin à avoir des furoncles, des maux de tête et d’autres maladies douloureuses. Son comportement en tant que chef de l’Armée Confédérée du Tennessee fut aussi mystérieux pour ses contemporains qu’il l’est encore aujourd’hui pour les historiens. Et le penchant de BRAGG pour tourner le dos à la victoire au dernier moment, quittant la bataille alors qu’il avait tous les atouts en main, fut à l’origine d’une histoire disant que, lorsqu’il mourut, il alla au paradis, et alors qu’il s’approchait des portes du paradis, elles s’ouvrirent, puis BRAGG battit en retraite. Certains critiques et historiens attribuent les échecs de BRAGG à la stupidité, l’incompétence et la lâcheté. Mais il est possible que ses erreurs aient été le résultat de sa santé et du niveau rudimentaire, voire primitif, de la médecine pendant cette guerre. Le comportement de BRAGG trahissait l’usage d’opiacés. Sur le terrain, il semblait se retirer au fur et à mesure que se développait la bataille, et perdre le sens de l’endroit où il se trouvait. Il se montra incapable d’adapter ses plans à des situations qui changeaient sur le champ de bataille.

Mais BRAGG n’était sûrement pas un idiot, comme le prouve sa rapidité à se déplacer en Septembre 1862, du Tennessee vers le Kentucky, pour arracher l’Etat à l’Herbe Bleue au Major General de l’Union Don Carlos BUELL. Ce n’était pas un lâche, comme le montraient ses états de service durant la Guerre du Mexique et lors de la bataille de Shiloh. Mais, lorsqu’il fut promu à un commandement supérieur, BRAGG devint plus distant avec ses hommes, évitant tout commandement actif au cours de la bataille. Son comportement pourrait bien avoir résulté d’une santé précaire, et de l’utilisation d’opiacés. BRAGG peut très bien avoir cru au contenu tout à fait infondé de son propre télégramme du 31 Décembre 1862 au Président Confédéré Jefferson DAVIS, selon lequel il avait gagné la bataille de Stone’s River dès le premier jour. L’euphorie provoquée par l’opium peut avoir produit cet effet, lui faisant croire lui-même que ce qu’il avait désespérément voulu était devenu vrai. L’euphorie peut avoir poussé BRAGG à se retirer de devant les troupes de BUELL après avoir fait prisonnier toute la garnison Fédérale de Munfordville, Kentucky, en Septembre 1862 et en capturant Frankfort, la capitale d’état. Cette même euphorie peut lui avoir fait hâter son départ vers Richmond avant la bataille de Perryville, Kentucky, en Octobre 1862, disant que son armée avait rejoint celle du Major General Edmund Kirby SMITH, alors que les forces de SMITH étaient encore à plus de cent miles. Les visions faussées qu’avait BRAGG du succès et sa paranoïa à l’égard de ses officiers après chaque défaite, pourraient avoir été les fruits de son suivi médical. Le galant John Bell HOOD, agressif, vigoureux et efficace dans l’Armée de Virginie, devint la victime de ses délires après avoir été ébranlé par une série de blessures. Il laissa ses plus beaux attributs et sa raison sur la table d’opération du chirurgien. La douleur du moignon sur sa jambe droite devait lui faire un mal horrible quand il chevauchait attaché à sa selle. Les trépidations et les rebonds, le frottement abrasif de la chair à peine cicatrisée contre le tissu rêche du pansement ou d’un tampon n’auraient pas pu être endurés sans quelque sorte d’analgésique. Un opiacé était le médicament standard. La drogue aurait fait dormir HOOD à Spring Hill, pendant que les Fédérés s’échappaient du piège qu’il leur avait tendu. La douleur était un fardeau terrible à endurer pour HOOD, mais HOOD fut encore pire à endurer pour l’Armée du Tennessee.

L’attirance qu’avait le Major General de l’Union Joseph « Fighting Joe », Joe le Battant, HOOKER pour les liquides spiritueux et les femmes sous spiritueux était de notoriété publique à l’époque où il menait l’Armée du Potomac vers la bataille à Chancellorsville, Virginia, en May 1863. Si HOOKER était vraiment un alcoolique, et s’il respectait son serment de ne pas boire pendant qu’il commandait, il est fort probable qu’il était sous opiacés pour l’aider contre le manque, les opiacés étant à cette époque couramment utilisés pour traiter le delirium tremens. Ce scénario médical pourrait expliquer ses pauvres performances sur le champ de bataille. Ou alors, c’est qu’il y en avait un autre. Le plan de HOOKER pour la bataille de Chancellorsville était excellent. Ce sont ses qualités de chef qui firent défaut au fur et à mesure qu’il tomba dans la léthargie. Le général admettait la chose lui-même. Et puis, le 3 Mai, HOOKER dit qu’il avait été heurté à la tête par une colonne cassée par un tir de canon, alors qu’il se tenait sous le porche d’une maison. Il prétendait qu’il avait très mal. Maman j’ai très bobo ! J’ai besoin d’un fix ! Vite, il m’en faut un !  Le médecin de l’Armée du Potomac, le Docteur Johnathan LETTERMAN, confirma plus tard que HOOKER avait eu très mal, mais ne décrivit pas la nature de la blessure, ni l’amplitude de la douleur, ni si l’on avait administré de l’alcool ou de la morphine. Mais le comportement de HOOKER pour le restant de cette journée-là indique qu’on a pu lui faire prendre un médicament « toxique », car il délaissa le commandement de son armée et s’en fut dormir dans sa tente. Pris sous doses plus faibles que du whisky, l’opium est un somnifère efficace.

Les trois généraux dont il a été question ici ne furent pas les seuls à faire preuve de comportement radicalement différents durant la bataille, des changements qui pourraient trahir l’ingestion d’alcool ou d’opium. BRAGG, HOOD et HOOKER n’étaient que de simples exemples de haut rang. Les opiacés peuvent avoir joué sur la timidité du Lieutenant General Confédéré Richard Stoddert EWELL, qui se précipita courageusement dans Gettysburg en juillet 1863, attaché à son cheval avec une jambe en moins, et poursuivant les Fédérés en les chassant hors de la ville, mais qui tomba ensuite dans l’inertie. Et que dire de l’ennemi de BRAGG, BUELL, qui s’assit derrière ses lignes pendant toute la bataille de Perryville en Octobre 1862, après être tombé de cheval ? Il y en a encore d’autres. Il ne faut pas en conclure que tous les chefs militaires de la Guerre Civile étaient des alcooliques ou des drogués. Ulysses S. GRANT était sûrement connu pour être un buveur à deux mains, mais l’alcool ne l’empêcha pas de remporter des victoires. Une autre observation importante au sujet de GRANT, c’est qu’il n’eut jamais besoin des services d’un médecin à cause d’une santé précaire. Rien que cet état de fait peut avoir été une bénédiction pour l’Union. A cause de l’état des arts médicinaux et de la science pendant la Guerre Civile, quelques officiers, faiblement étayés par l’alcool ou les opiacés, arrivèrent à garder des positions de grandes responsabilités même en étant inaptes à tout service militaire. D’autres furent retenus après avoir souffert de blessures ou contracté des maladies qui avaient diminué leurs capacités, alors qu’ils auraient du être démobilisés ou affectés à des rôles non combattants. Mais au lieu de cela, l’histoire est parfois faite d’hommes qui ne virent leur champ de bataille qu’à travers les nuages de la défonce.

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Le Remington « rolling block » militaire

Traduction d’un article de George J LAYMAN paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1988

« D’une simplicité, d’une robustesse, d’une durabilité et d’une rapidité de feu inégalées… Plus de 1 600 000 du célèbre fusil Remington ont été vendus » Ces mots sont tirés du catalogue d’armes Remington de 1902.

Des déclarations aussi vantardes que celle-là, faites en tant que publicité pour le fusil militaire Remington Rolling Block modèle 1897 qui venait de sortir, rappelait au monde que cette célèbre famille d’armes à feu n’était toujours pas près d’être mise à la retraite.

Le Springfield Trapdoor, le fusil Sharps et presque toutes les autres armes d’épaule militaires à un coup étaient tous, il est vrai, condamnés à l’obsolescence pour le tournant du siècle. Mais le fusil à chargement par la culasse conçu par Joseph RIDER et inspiré de Leonard GEIGER n’était, lui, pourtant pas encore considéré comme dépassé. Jusqu’à 1900, pas moins de vingt-cinq nations avaient, soit adopté, soit commandé, d’innombrables quantités de Remington Rolling Block pour leurs forces armées ou garde nationale ou civile. Jusqu’à une époque aussi tardive que la Première Guerre Mondiale, le gouvernement Français avait commandé plusieurs milliers du fusil Remington Rolling Block pour poudre sans fumée en calibre 8 millimètres, et dans cette deuxième décade du vingtième siècle, ils combattaient aux côtés des Browning Automatic Rifle et d’autres armes contemporaines de l’époque.

Au moins quatre pays avaient obtenu des droits de fabrication pour produire l’arme dans leurs propres arsenaux. A la fin de la Première Guerre Mondiale, plus de 2 000 000 de ces fusils à bloc roulant existaient, produits soit par Remington ou par d’autres nations outre Atlantique.

Mais les temps n’avaient cependant pas toujours été fastes pour la Remington Arms Company, car la compagnie avait presque sombré dans l’oubli juste avant que le système du bloc roulant grimpât vers la gloire. En 1865, Remington fit l’expérience d’un baisse d’affaires due à la saturation en matière d’armes juste après la Guerre Civile, tout comme pratiquement la totalité de ses concurrents. Après avoir vendu plusieurs milliers de ses excellents revolvers à percussion au Gouvernement Fédéral, Remington se retrouva brusquement en compétition avec le gouvernement des Etats Unis, pour le marché des surplus d’armes et de munition à la fin de la guerre. Les institutions militaires n’avait plus besoin maintenant de ces vastes quantités d’armes d’ordonnance qu’elles avaient en trop. Il fallait quelque chose de révolutionnaire pour satisfaire le nouveau marché sophistiqué de l’armement d’ordonnance américain.

L’usine d’Oliver WINCHESTER à New Haven, état du Connecticut, avait innové avec B. Tyler HENRY, sous la forme de la Winchester modèle 1866 en fusil et en carabine. C’est ce qui mit le concurrent direct du fusil Henry à l’époque de la guerre, la Spencer Repeating Arms Company, sur le chemin de la catastrophe financière. Le pain et le beurre de Remington étaient à ce moment-là les revolvers à percussion modèles New Army et Navy, qui avaient été ponctuellement livrés au gouvernement. Son concurrent le plus sérieux, la Colt Patent Firearms Company, qui avait commencé elle aussi comme fabricant de revolvers, était déjà en train d’améliorer ses armes de poing à percussion en les transformant pour tirer des cartouches métalliques.

Vers la fin de 1863, Remington donna des instructions à Joseph RIDER de Newark, Ohio, pour qu’il reprît un système d’arme d’épaule à un coup qui lui avait été proposé à l’origine par Leonard GEIGER de New York. Joseph RIDER fut donc le concepteur du fusil Remington Rolling Block. Le premier brevet du nouveau système fut déposé en 1868. RIDER naquit en 1817 et mourut en 1901. Il était originaire de Newark, Ohio. Le résultat final des travaux de RIDER deviendrait la pain béni de Remington, en donnant au public l’occasion d’acquérir une arme extraordinaire.

Bien que RIDER commençât déjà à travailler sur le système original GEIGER vers la fin de 1863, l’arme ne fut pas produite avant le début de 1865, quand les hostilités entre le Nord et le Sud furent sur le point de s’achever. Connue sous le nom de carabine Remington Split Breech, soit à bloc pivotant, ce précurseur du bloc tournant fut immédiatement achetée par le gouvernement, mais arriva trop tard en service pour voir le combat. Bien que l’arme fût chambrée pour la cartouche relativement moyenne à percussion annulaire Spencer en calibre .56, RIDER savait que son système de bloc pivotant laissait beaucoup à désirer en matière de solidité. Il eut tôt fait d’améliorer le système, en remplaçant le bloc d’origine se séparant en deux, par un autre beaucoup plus robuste.

La carabine Remington à bloc pivotant de RIDER

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Croquis original du brevet de Leonard GEIGER du 27.01.1862

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RIDER le présenta à l’inspection chez Remington vers la fin de 1865, et il devint le système Number One, c’est-à-dire Numéro Un. Profondément confiant, Remington fut persuadé que le fusil avec son nouveau système de bloc roulant serait un coup au but immédiat dans les forces des Etats Unis. Malgré les arguments plutôt convaincants de la compagnie que le nouveau fusil serait le bon choix pour convertir les milliers de mousquets à chargement par la bouche en calibre .58 disponibles dans les inventaires du gouvernement, le Ministère de la Guerre, ou War Department, avait déjà d’autres idées en tête. Après avoir été choisi lors des essais d’armes à chargement par la culasse de 1865, le système dit « Trapdoor » conçu par F.S. ALLIN chez Springfield Armory était parti pour devenir la nouvelle arme de service de l’Army. En dépit du fait que l’arme de Remington possédait une système plus simple, supérieur, l’Army se cantonna dans son choix « maison ». Le Rolling Block ne fut acheté qu’en quantités limitées pour les tests et les évaluations.

Le brevet de Joseph RIDER renouvelé le 31.12.1872

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Jamais découragés ni lents à la détente, les frères REMINGTON ouvrirent intrépidement un marché nouveau et lucratif de l’autre côté de l’Atlantique ! Si l’habileté au commerce fut jamais un facteur de succès en matière d’affaires, ce fut bien là la clé de l’ascension du Remington Rolling Block vers la gloire. En Février 1866, les frères étaient prêts à lancer une tournée de démonstration du bloc roulant en Europe. Entre eux, ils décidèrent que celui qui serait le plus capable et le plus convaincant de toute la famille, serait Samuel. Samuel REMINGTON était un gentilhomme poli, sociable et à l’esprit vif, dont la qualité exceptionnelle était qu’il pouvait être parfaitement à l’aise, aussi bien avec les gens les plus frustes qu’avec le prince le plus impérial. Cette qualité s’avérera être le secret du volume des ventes du Rolling Block. En été 1866, Sam s’embarqua pour l’Europe, emportant avec lui des fusils et des carabines à bloc roulant. Au fur et à mesure qu’il voyageait à travers le continent, les observateurs militaires de tous les pays apportèrent une attention toute particulière à ces armes. A elle toute seule, l’Europe était sur la brèche pour l’adoption d’une arme à chargement par la culasse de bonne conception. Aidées par la personnalité extravertie et vive de Sam, les présentations firent que le système à bloc roulant devint incroyablement populaire auprès de beaucoup de hauts dignitaires Européens. Lors de l’Exposition Impériale de Paris en 1867, à la surprise de Samuel REMINGTON lui-même, la Haute Commission de l’Armement, sous la présidence du Maréchal de France CANROBERT et les experts en armes d’ordonnance de Belgique, d’Autriche, de Suède, d’Espagne et de l’Italie, accordèrent la Médaille d’Argent de l’exposition au système Remington Rolling Block !

Peu de temps après, Sam prit la première grosse commande de sa compagnie de la part d’un client Européen, le Danemark. Ce pays commanda 42 000 fusils et carabines pour ses forces armées et, en travaillant ensemble, Remington et les autorités d’ordonnance danoises développèrent la cartouche de 11,7 X 51 MM dite aussi « Remington Danois ». Il s’agissait d’une cartouche à percussion annulaire utilisant une balle de 380 Grains poussée par 50 Grains de poudre noire Fg. En 1871, le Danemark avait obtenu les droits de fabrication pour produire le Rolling Block à son propre arsenal de Copenhagen, et avait modifié la cartouche en percussion centrale. Le Rolling Block fut utilisé par les Danois comme arme militaire de première ligne jusqu’en 1884, où elle fut remplacée par une arme à répétition. En 1868, la Suède commanda 40 000 fusils, à livrer sur une période de deux ans. Son voisin la Norvège suivit peu de temps après. La cartouche qui fut développée pour ces deux pays scandinaves fut la 12,11 MM dite « Remington Norvégien/Suédois », dont la longueur n’était qu’un tout petit peu plus courte que la cartouche de .50/70 Govt. des Etats Unis. Comme par réaction en chaîne, Samuel REMINGTON prenait des commandes partout où il s’arrêtait. Et sur le chemin du retour, la Marine des Etats Unis, la célèbre United States Navy, déjà satisfaite de ses pistolets Rolling Block qu’elle avait achetés en 1866, commanda 5 000 carabines à la fin de 1868. En 1870, la Navy commanda 12 000 fusils « à deux bandes » en .50/70 Govt., qui furent distribués au Marine Corps et furent les premières armes d’épaule militaires tirant à cartouche utilisées par les Etats Unis lors d’un conflit à l’étranger. En 1871, le navire USS « COLORADO » et une petite flottille de vapeurs jeta l’ancre sur la côte Coréenne, près de l’île de Kanghwa Do. Quand les négociations pour ouvrir les portes du royaume ermite Coréen s’envenimèrent, une altercation s’ensuivit et dégénéra en une sévère fusillade. Les fusiliers marins de la Navy se retrouvèrent inférieurs en nombre mais, après plusieurs jours d’accrochages, les forces Coréennes furent maîtrisées et le bastion de l’île fut pris. La fiabilité et le tir rapide du Remington Rolling Block avaient assuré aux U.S. leur première victoire en terre étrangère. En termes de chiffres purs dans les achats de Remington Rolling Block, l’Espagne remporta la première place des premiers clients en grande quantité. En 1866, les Espagnols achetèrent 10 000 conversions du fusil à chargement par la bouche en calibre .58. Parfaitement satisfaite après l’évaluation du nouveau système, l’Espagne commanda 85 000 fusils et 10 000 carabines en 1869, dans le calibre 11,5 X 58 MM dit « Remington Espagnol ». Ce calibre de 11 MM, alias .43 Espagnol, avait été conçu spécialement pour être le nouveau calibre réglementaire de l’Espagne, et il servit aux côtés de son homologue local, dit .43 Reformado, pendant plus de vingt-cinq ans. La fin officielle de son service fut l’année 1898. Au début de 1870, l’Espagne obtint les droits pour la fabrication du Rolling Block à Oviedo, et il y était encore fabriqué dans les années 1930 pour le marché civil espagnol.

Au cours des démonstrations de Samuel REMINGTON à la fin des années 1860, l’Egypte se montra fort intéressée par l’acquisition d’une arme à chargement par la culasse pour son armée. Après voir envoyé une commission à l’Exposition Impériale de Paris de 1867 pour se renseigner sur le Remington Rolling Block, le Khédive d’Egypte, Ismaël PACHA, invita Sam au Caire pour une évaluation officielle. Les forces armées égyptiennes étaient en cours de ré-organisation par l’ancien Général Confédéré STONE et, après que leur utilisation du Remington Rolling Block eût été homologuée en 1869, le Khédive estimait qu’il était impératif pour lui d’en prendre livraison le plus vite possible. Dans l’esprit de faciliter une expédition rapide de 60 000 fusils et carabines, le dirigeant Egyptien offrit à REMINGTON une parcelle de terrain dans le quartier le plus chic du Caire. Incapable de refuser sans offenser le Khédive, Samuel accepta et y fit construire une riche résidence. Il ne l’utilisa toutefois qu’occasionnellement, et l’endroit servit aux Britanniques jusque dans les années 1950, comme résidence pour leurs personnalités basées en Egypte. Les fusils égyptiens furent, tout comme leurs prédécesseurs des contrats européens, chambrés pour une autre de ces cartouches à percussion centrale développées par Remington. Le 11 X 50 R MM dit « Remington Egyptien » ou .43 Egyptien, était constitué d’une balle calepinée en papier de 400 Grains, sur une charge de 75 Grains de poudre noire FFg. Elle donnait suffisamment de pouvoir d’arrêt et de stabilité pour une utilisation dans les vents violents du désert du Sahara. Mais la commande initiale de 60 000 fusils et carabines n’arriva jamais au Caire.

Juste avant le début de la guerre Franco-Prussienne en 1870, la France envoya des acheteurs à travers le monde pour se procurer des armes de tous types. La France était en train de reconstruire et de moderniser frénétiquement ses forces, essentiellement armées de l’inefficace fusil Chassepot. D’une manière ou d’une autre, les acheteurs arrivèrent à convaincre le gouvernement Egyptien qu’ils avaient besoin d’obtenir la toute nouvelle commande de Rolling Blocks, et les Egyptiens résilièrent d’eux-mêmes le contrat qu’ils avaient conclu avec Remington. Le lot complet de fusils fut détourné vers Paris. En 1870-71, la France fit à son tour une commande à Remington, pour 130 000 fusils Rolling Block supplémentaires, mais elle dut les accepter en .43 Espagnol. Malgré ses fusils Rolling Block, son armée équipée de bric et de broc ne se débrouilla pas trop bien pendant la guerre Franco-Prussienne, et elle dut céder une grande partie de son territoire à l’Allemagne. Mais, malgré ses pertes, la France, satisfaite de ses Remington Rolling Blocks, commanda 145 000 autres de ces fusils à chargement par la culasse en 1874, sous le modèle « Garde Civile », et chambrés pour la nouvelle cartouche d’ordonnance en 11 MM Gras. Cette version arma les forces coloniales au Maroc, en Algérie, et dans d’autres parties du monde.

En 1875, l’Egypte, après avoir passé une nouvelle commande de 90 000 fusils Rolling Blocks, reçut finalement la quantité totale et les utilisa tout au long de la moitié du XIXe. siècle. Beaucoup des Rolling Block Egyptiens furent donnés au Soudan, et une quantité d’entre eux, dans les mains des Soudanais de Mahdi, les « fuzzy wuzzys », ou « foufous crépus », eut une part de responsabilité dans la défaite du Général Britannique Charles GORDON dit « le Chinois », lors du siège héroïque de Khartoum en 1885.

Bien que le Danemark, l’Espagne, la France et l’Egypte fussent parmi les plus grands acheteurs de Remington, après 1873 beaucoup d’autres pays se portèrent acquéreurs du « meilleur fusil militaire de son temps ». En 1874, Les Etats Pontificaux commandèrent un nombre aujourd’hui inconnu de ces fusils pour armer les Gardes Suisses du Vatican, chambrés dans leur propre calibre 12,7 X 45 R MM dit « Remington Pontificio ». Cette cartouche à percussion centrale était inhabituelle dans le fait que certaines étaient fabriquées en papier et d’autres en cuivre, et que le bourrelet était une pièce séparée attachée à la douille. Entre 1871 et 1874, la Chine acheta 144 000 fusils, et en 1876, le Mexique fit sa deuxième acquisition de 4 000 armes avant de passer d’autres commandes. Le Rolling Block était tellement populaire au Mexique que, même bien après ses heures de gloire dans les années 1870, beaucoup de ces vieux Remington à poudre noire chevauchaient avec les soldados de Pancho VILLA en 1916. Le chambrage des Remington Rolling Block en .43 Espagnol concernait les trois-quarts des ventes de ce fusil entre 1870 et 1890, avec pratiquement toute l’Amérique Centrale et l’Amérique du Sud utilisant ce calibre.

Les seules exceptions furent le Brésil, qui commanda ses fusils en 11 MM « Brésilien Comblain », et quelques autres pays d’Amérique Latine qui passèrent commande pour des armes rayées dans leur propres calibres. De toute évidence, beaucoup de clients militaires du Rolling Block ne voulaient pas de l’équipement standard des versions de production du Remington. C’était vrai également pour les Etats Unis. Remington avait finalement réussi à convaincre au moins une partie de l’autorité militaire des Etats Unis que son Rolling Block était un bon fusil de première ligne. En 1872, New York acheta un lot de fusils pour sa milice d’état, et demanda que ces armes chambrées en .50/70 fussent équipées d’un deuxième verrou de sûreté. Le Colonel George W. WINGATE décrivit le mieux ce mécanisme dans son livre “Manual for Rifle Practice” écrit en 1875 : « Le chien est disposé de façon à opérer en connexion avec un deuxième verrou, construit de manière à permettre au chien de passer assez loin sous le bloc de culasse pour mettre celui-ci en sécurité dès qu’il est fermé. Dans cette position, le verrou secondaire est engagé avec le cran du demi-armé, et l’arme ne peut pas tirer sans que le chien soit armé à nouveau. » Ceci n’état pas une nouveauté chez Remington, puisque le Rolling Block modèle 1871 de l’U.S. Army, fabriqué chez Springfield Armory avait été construit avec un « système de sécurité ». On en sait pas si les armes produites à Springfield l’ont été sous contrat avec Remington ou pas. Ce fusil ne fut cependant que l’un des concurrents aux essais des armes à chargement par la culasse de 1872, et seules 10 000 de ces armes furent construites.

Vers les années 1890, la fin de l’ère de la poudre noire approchait à grands pas. En 1896, Remington sortit une version modernisée de son Rolling Block, le Fusil Militaire Modèle Numéro Cinq « Sans Fumée », dit Modèle 1897. Ce fusil se vendit bien, malgré le fait que plusieurs fusils militaires à répétition tirant de la poudre sans fumée fussent déjà en usage à l’époque. La publicité de Remington elle-même le dit peut-être mieux que n’importe autre déclaration : «  Ces armes ont été produites pour satisfaire un besoin urgent de fusils à grande puissance construits autour du système simple de Remington, que les armées connaissent si bien et pour qui les fusils compliqués à chargeur ont été une source constante de problèmes et de dangers. » Une autre considération importante dans la transition entre la poudre noire et la poudre sans fumée pour les autorités militaires du monde entier, était le prix. Un exemple : L’Allemagne présentait ses divers modèles de fusils à répétition avec la culasse Mauser à un prix standard de 35,00 $. Beaucoup de pays, particulièrement en Amérique Latine, ne pouvaient pas se permettre de payer ce prix, spécialement s’ils devaient ré-armer leur force militaire toute entière. Les Remington Rolling Block modèles 1897 et 1902 étaient listés à 20,00 $ pour le fusil et 18,00 $ pour la carabine, et ces prix étaient souvent réduits jusqu’à 50 % pour les contrats militaires ! Après avoir fini le lot de 50 000 fusils chambrés en 8 MM Lebel qui avaient été commandés par la France de 1915 à 1916 pendant la Première Guerre Mondiale, la section « Rolling Block » de l’usine d’Ilion, dans l’état de New York, démonta et déménagea tous ses outillages et équipements. Seul resta en fabrication le Fusil de Sport Modèle Numéro Quatre jusqu’en 1934, quand la production s’arrêta pour lui aussi. L’utilité pratique du Remington Rolling Block militaire en tant qu’arme de combat efficace a depuis longtemps disparu. Sa dernière performance dans les mains d’une puissance militaire a été contre l’Espagne lors de la Guerre de 1898. Mais, entre 1961 et 1965, au début de la Guerre du Vietnam, on a vu quelques Rolling Blocks dans les mains du Viet Cong. Ces fusils, chambrés pour la cartouche de 7,62 MM Russian, avaient probablement été donnés aux Nord-Vietnamiens par la Russie dans les années 1950, et provenaient de surplus achetés par le gouvernement du Tsar à Remington en 1915. Aujourd’hui, beaucoup de tireurs aux armes anciennes utilisent des fusils Remington Rolling Block et semblent vouloir continuer à le faire pour les prochaines années à venir. Pendant plus d’un siècle, cette arme vénérable est restée, sans aucun doute, « Le Meilleur Choix du Monde ! »

Pour les Français, on retient : Premier contrat en 1870, 130 000 en .43 Espagnol ; Contrat Egyptien commandé en 1869 et piqué en 1871 : 60 000 en .43 Egyptien ; Deuxième contrat de 1871 à 1874 : 145 000 en 11 MM Gras ; Troisième contrat en 1915 : 50 000 en 8 MM Lebel. Soit un total de 385 000 fusils au moins sur une estimation de 2 000 000, ou près de 20 % de la production totale. Et nos acheteurs n’ont même pas eu à donner un morceau de terrain à l’oncle Sam comme les Egyptiens, juste une montagne de pépètes pour des armes qui ne nous ont servi à rien de bien à l’époque… Derrière, la Chine avec 144 000 de 1871 à 1874, puis l’Espagne avec 95 000 en 1869 et l’Egypte avec 90 000 en 1875.

LA MORT DE « CHEVEUX JAUNES »

Traduction d’un article de Tom E. O’NEIL paru dans D.G.W. Blackpowder Annual 1993

C’était le 27 Juin 1876. La brume du petit matin se dissipait alors que les soldats du Général Alfred TERRY arrivaient dans la vallée de la rivière Little Big Horn. A cet endroit, deux jours plus tôt, Georges Armstrong CUSTER ainsi que deux cent dix hommes de son bien-aimé 7ème. U.S. Cavalry et sous son commandement, avaient rencontré leur destin. Au fur et à mesure que les hommes de TERRY avançaient sur le champ de bataille, ils découvraient des corps horriblement mutilés et le spectacle de ce qui avait du être un combat désespéré. Quand les soldats arrivèrent plus haut dans les collines, ils trouvèrent le corps de celui que la Guerre Civile avait rendu célèbre, le chef de la Guerre Indienne, mort à l’âge de trente six ans. On retrouva les restes de la « Fleur de l’Armée Américaine » éparpillés sur une surface que l’on pourrait appeler la zone de commandement, un petit promontoire en haut de ce qui est devenu « La Colline de la Dernière Position ». C’est là, aux côtés de celui de CUSTER, que l’on retrouva les corps de neuf hommes, dont son premier assistant, le Lieutenant William Winer COOKE, et son frère Thomas Ward CUSTER qui lui avait servi d’aide de camp pendant cette campagne. On retrouva le cadavre de CUSTER sur celui de deux cavaliers, le Chef Trompette Henry VOSS et le Porte-Drapeau le Sergent John VICTORY. VICTORY gisait face au ciel, le bras droit coupé à la hauteur de l’épaule. VOSS gisait en croix sur lui, face contre terre. CUSTER se trouvait entre les deux, presque nu, affaissé en position couchée. Seules ses hanches touchaient le sol, son bras gauche était étendu naturellement, et sa jambe droite reposait sur un autre corps couché à ses pieds. Son avant-bras droit était si contracté que son coude s’appuyait sur l’un des corps sur lequel il était couché. Sa tête pendait. On aurait vraiment cru qu’il était en train de faire une de ses fameuses siestes, mais il ne devait jamais se réveiller de ce sommeil-là. Le corps de CUSTER avait été dépouillé de ses vêtements, à l’exception de ses chaussettes de laine et de la cambrure de l’une de ses bottes. Il y avait deux blessures par balles sur le cadavre : l’une dans la tempe gauche, à mi-hauteur entre l’oreille et l’œil, et la deuxième traversait la cage thoracique juste sous le cœur. La mutilation du corps était faible en comparaison de la plupart des soldats qui avaient été horriblement défigurés. Une flèche avait été poussée dans son pénis et la cuisse gauche avait été lacérée au couteau, mettant l’os à nu. Son auriculaire droit avait été coupé, probablement pour récupérer son anneau de West Point. Le cadavre avait viré au noir sous l’effet de l’exposition au soleil, et le torse et l’estomac étaient gonflés par l’expansion des gaz qu’ils renfermaient. Des milliers de mouches tournaient autour du cadavre qui commençait déjà à pourrir. Bizarrement, au milieu de tout ce carnage, des témoins rapportèrent que son visage exprimait presque la paix, et qu’il ne laissait paraître aucune trace d’agitation. On a suggéré de déterrer le corps de CUSTER pour l’examiner avec des méthodes modernes et déterminer comment il mourut. CUSTER fut d’abord enterré dans une tombe peu profonde et une année passa avant que l’armée revînt sur les lieux et enterrât à nouveau les hommes. Il semble que le cadavre fut tiré de son trou par les loups et les coyotes. La troupe chargée du nouvel enterrement, dirigée par le Capitaine Michael SHERIDAN, frère du Général Phil SHERIDAN, ne fut même pas sûre d’avoir trouvé la bonne tombe. En toute connaissance de cause, les restes qui sont enterrés à West Point sont au mieux le crâne de CUSTER, une partie de la colonne vertébrale, et une poignée d’ossements plus petits.

A l’époque de sa mort, George Armstrong CUSTER avait le grade de Lieutenant Général, pas de Général. Comme beaucoup d’officiers, il avait gravi les échelons pendant la Guerre Civile. A l’âge de vingt quatre ans, CUSTER avait été nommé Major Général pour commander la Troisième Division de Cavalerie de l’Armée du Potomac. Ceci ferait de lui le deuxième des officiers supérieurs les plus jeunes de l’Histoire, une distinction qu’il tient toujours. Seul le Marquis de Lafayette, lors de la Guerre de la Révolution, était plus jeune que lui. A la fin de la Guerre Civile, tous les officiers brevetés reprirent leur rang normal dans l’armée. Encore Major Général, CUSTER avait été envoyé au Texas pour combattre éventuellement contre les Français au Mexique. Au Texas, CUSTER se vit notifier qu’il avait été relégué à son rang normal de Capitaine. Il ne s’agissait pas là d’une punition, mais d’une pratique militaire courante en ces temps-là. En un rien de temps, CUSTER fut promu Major, puis Lieutenant Colonel. On n’avait encore pratiquement jamais vu ce genre de promotion à l’époque et elle en dit beaucoup sur la confiance que les supérieurs de CUSTER plaçaient en lui.

En fait, CUSTER n’était pas le vrai commandant officiel du tout nouveau 7ème. U.S. Cavalry. Ce poste était occupé par un certain Colonel SMITH, puis par un Colonel STURGIS, dont le fils allait d’ailleurs mourir avec CUSTER. Le Général SHERIDAN gardait toujours ces Colonels loin du 7ème. Cavalry lorsque celui-ci était en campagne. C’est pourquoi CUSTER était, en mission, considéré comme le vrai commandant du 7ème. Pour le public, le 7ème. était « Celui de CUSTER. »

Les années passant, beaucoup de légendes ont crû sur la vraie cause de la mort de CUSTER, certaines d’entre elles sortant tout droit d’Hollywood. Nous allons essayer de retracer tous ses gestes et tenter de montrer comment CUSTER mourut probablement, et quand. La cause exacte de la mort de CUSTER restera un mystère éternel. Ce n’est rien d’autre que l’un de tous ces puzzles formant ce Dimanche de Juin 1876, l’année où la nation célébrait son centenaire. Si l’on veut étudier la nature de sa mort, il faut en même temps prendre en compte tous les endroits où elle eût pu avoir lieu. Parmi toutes les théories sur l’endroit où CUSTER est mort, on a : il a été tué par l’un des éclaireurs Indiens avant que l’unité fût vraiment engagée dans la bataille ; il a été tué par une balle Indienne à l’endroit où le canyon Medecine Tail Coulee donne sur la Little Big Horn River ; il a été tué en haut des collines s’éloignant de Calhoun Hill ; ou il a été tué sur la « colline de la Dernière Position ». Dans les « tueurs » de CUSTER on trouve, mis à part l’éclaireur mentionné précédemment, ou les éclaireurs, certains Indiens, son frère Tom, ou d’autres officiers. Certains suggèrent qu’il mourut de sa propre main. Beaucoup de ces scénarios de mort, à cause de leur côté « sensationnel », ont trouvé leur voie dans des publications prestigieuses. Malheureusement, peu d’entre elles constituent des preuves de ce qui s’est vraiment passé. Depuis 1876, chacun de ces scénarios de mort a eu ses champions, et en analyse finale, chacun d’eux mérite un peu de crédibilité puisque la vérité ne sera jamais connue. Mais un peu de travail de détective permettra de mieux comprendre le mystère, à défaut d’arriver à une conclusion certaine.

Il y a très peu de preuves que CUSTER pût être tué plus tôt ou près de Cedar Coulee, ou même un peu après, là où le Medecine Tail Coulee donne sur la rivière. Cette version de la mort de CUSTER ressemble plus à de la fiction qu’à une sérieuse investigation historique et/ou militaire. D’après ce que nous savons des mouvements militaires ce jour-là, l’éventualité d’une blessure ou d’une mort prématurées de CUSTER reste assez faible. Par exemple, David H. MILLER raconta que l’Indien White Cow Bull prétendit en 1938 avoir tué un homme vêtu de peau à l’embranchement du Medecine Tail Coulee, et que la monture de sa victime avait quatre « chaussettes » blanches, tout comme Vic, le cheval sur lequel était monté CUSTER lors de la bataille. Il est vraiment extraordinaire que la mémoire de cet Indien fût restée aussi vive soixante deux ans après le peu de temps que dura cette action à cet endroit-là. Il faut prendre en considération deux états de fait importants. Le premier, c’est que plus tôt dans la journée, CUSTER avait enlevé sa veste de peau et avait mis sa chemise bleue. Avec une température ambiante tournant autour de 90°, soit + 32,22 ° C, et une saturation en vapeur d’eau en rapport avec cela, il est hautement improbable qu’il ait remis sa veste depuis. Le deuxième, c’est que si White Cow Bull était vraiment là, dans un air chargé de fumée et de poussière, il devait être lui-même en train de courir de tous les côtés pour éviter qu’on lui tire dessus. En gardant cette situation à l’esprit, il est plutôt difficile de croire que quelqu’un pût se souvenir de la couleur des chaussettes d’un cheval qu’il voyait de l’autre côté de la rivière. Une autre théorie dit que CUSTER fut abattu par un éclaireur Indien félon. Cette histoire est presque aussi vieille que la bataille elle-même. Elle a été exploitée au point de désigner l’éclaireur Mitch BOUYER. La légende selon laquelle BOUYER était de connivence secrète avec les hostiles parce qu’il était demi-sang eut sa ration de gloire dans la presse, mais elle ne résiste pas non plus à l’analyse. Premièrement, il n’y a aucune raison pour laquelle BOUYER ou tout autre éclaireur eût pu tuer CUSTER. A quoi cela aurait-il servi ? Et imaginer une situation où CUSTER ou ses officiers autour de lui eussent pu regarder calmement l’un ou l’autre des éclaireurs sorte son arme et lui tire dessus, est plutôt tiré par les cheveux. Si BOUYER ou tout autre éclaireur avaient fait ça, il aurait été abattu sur le champ, et le corps du meurtrier, ou de celui qui aurait essayé de le devenir, aurait été retrouvé à cet endroit. Avant l’engagement final, CUSTER libéra tous les éclaireurs de leur service sauf BOUYER lui-même, et les éclaireurs quittèrent la zone des combats et vécurent jusqu’à des âges avancés. Le corps de BOUYER fut retrouvé à des miles de l’endroit où il aurait tué CUSTER.

L’autre histoire sur un CUSTER blessé aurait eu lieu le long de la zone de bataille après qu’il eût quitté Calhoun Hill. Il faut réfléchir sur les raisons pour lesquelles le régiment dut manœuvrer à Calhoun Hill comme il l’a fait. Selon toute probabilité, lorsque CUSTER y arriva depuis la colline de Nye-Cartwright Ridge, il en avait assez d’attendre le Capitaine Frederick BENTEEN comme l’autre le lui avait proposé directement. Plus tôt dans la journée, BENTEEN avait été envoyé en éclaireur vers le Sud avec deux compagnies pour observer les Indiens et les empêcher de se sauver. Lorsque CUSTER trouva finalement le village principal, il envoya un ordre à BENTEEN qui disait : « BENTEEN, revenez. Grand village. Faites vite. Apportez les bagages. W.W. COOKE. P.S. Apportez les bagages ». CUSTER donnait là au Capitaine l’ordre exprès de revenir aussi vite que possible, en apportant avec lui la logistique qui incluait les réserves de munitions pour le régiment. L’ordre était signé de l’adjoint de CUSTER, William Winer COOKE, un officier né au Canada qui avait servi pendant la Guerre Civile. BENTEEN semble s’être déplacé à la vitesse d’un singe paresseux alors qu’un trot ou un galop s’imposaient, et n’apporta pas non plus les réserves de munitions. En fait, il ne répercuta jamais l’ordre de CUSTER au train ! Au lieu de cela, BENTEEN rejoignit le Major Marcus RENO sur le haut d’une colline à plus de quatre miles de l’endroit où CUSTER se battait. RENO lui-même avait reçu l’ordre de charger les Indiens, mais au lieu de cela et rencontrant peu d’opposition de l’ennemi, fit mettre pied à terre par ses hommes juste en dehors du village. De là, il emmena ses soldats dans une forêt proche, puis suivit un chemin dans la vallée, traversa la rivière, et remonta les flancs de la colline, de l’autre côté de la rivière. CUSTER décida qu’il ne pouvait pas attendre BENTEEN plus longtemps. Si l’on voulait obtenir la victoire, les unités devraient aller jusqu’à l’intérieur du village même. Sans la capture du camp ennemi, il n’y aurait aucune chance de gagner, ou peut-être même de garder le commandement. Pour Georges Armstrong CUSTER, les concepts d’attaque et de victoire ne faisaient qu’un. Il est étonnant que, l’une des rares fois dans sa carrière militaire, CUSTER ait montré autant de patience jusque là. Peut-être trop de patience. Cependant, des mouvements de troupes furent délibérément ordonnés depuis Calhoun Hill, et ce n’est sûrement pas un CUSTER blessé qui aurait ordonné d’aller en avant. La nature de sa blessure au thorax l’aurait rendu incapable de faire quoi que ce soit, et le commandement serait passé au Capitaine Miles KEOGH. On ne peut imaginer que KEOGH eût pu ordonner d’aller en avant avec un CUSTER blessé. En fait, ce cas de figure dépasse le possible car il ne correspond pas avec les circonstances. Il est ridicule de croire que KEOGH aurait fait traîner avec lui, sur un champ de bataille où l’action rapide s’imposait, un CUSTER mort pour le déposer beaucoup plus loin, là où son corps fut retrouvé. En plus de cela, si KEOGH avait été obligé de prendre le commandement, le premier adjoint, le lieutenant COOKE, aurait été retrouvé mort à côté de lui ou pas loin. On retrouva COOKE avec CUSTER. Cet état de fait force à penser que CUSTER était vivant lorsqu’il mena ses hommes à « Last Stand Hill », la colline de la dernière position ou, comme elle est parfois appelée, « Custer’s Hill », la colline de Custer. C’est donc un CUSTER bien vivant qui menait trois de ses cinq troupes jusqu’à l’endroit où on le retrouva, les hommes de KEOGH et de CALHOUN restant derrière pour protéger les flancs. La « Colline de la Dernière Position » est le point le plus élevé de cette zone et surplombe le village Indien. Vers la fin de la bataille, cet endroit fut choisi pour des raisons de défense. Il semble que, juste après avoir quitté Calhoun Hill, CUSTER perdit toute possibilité d’agir indépendamment. En termes de militaire, il était « engagé de manière décisive ». Ce qui veut dire qu’il ne pouvait plus agir de sa propre initiative, sauf répondre aux mouvements des Indiens. Une fois à cet endroit, les hommes de CUSTER ne pouvaient plus rien faire d’autre qu’attendre la mort, puisque RENO et BENTEEN refusaient de quitter leur position relativement sécurisée, bien qu’entendant les coups de feu qui venaient de la position de CUSTER. C’est là que CUSTER tomba, sur « Command Hill » tout en haut de « Last Stand Hill ». C’est là qu’il faut pondérer sur la théorie du suicide, sinon pour sa logique, au moins pour l’attention qui lui a déjà été portée. On a vu que seules deux blessures ont été observées sur le corps de CUSTER. Comme la blessure à la tête se trouvait du côté gauche de la tempe, le suicide peut être écarté. CUSTER était droitier, et un droitier ne tente pas de se suicider en mettant un pistolet sur le côté gauche de la tête. Cela aurait été extrêmement difficile et il n’y a pas de garantie de mort instantanée avec un coup. D’après ce que l’on sait sur sa personnalité, il ne semble pas que CUSTER se soit suicidé. Le suicide ne correspond pas avec la nature de l’homme, dont même ses ennemis disaient qu’il ne connaissait pas la peur.

Par-dessus tout, CUSTER était un homme de son temps et il avait la nature d’un guerrier romantique. Bien qu’il eût vu d’autres mourir dans les mains des Indiens, la mort de sa propre main aurait été totalement contraire à sa philosophie. Il est plus vraisemblable que la blessure sur le côté gauche du thorax fut la première insulte à son corps. Il n’y a pas de raison pour qu’elle ait été faite après le coup dans la tête. Cette blessure au thorax, bien que probablement pas mortelle tout de suite, aurait gravement handicapé le côté gauche du corps, rendant tout mouvement du bras gauche extrêmement douloureux, sinon impossible. Ceci exclut le coup de feu dans la tête en utilisant la main gauche, et transforme une balle dans la tempe gauche avec la main droite en quasi impossibilité. Dans l’éventualité où CUSTER eût pointé un pistolet sur sa tempe, n’importe quel coup aurait laissé deux marques. D’abord, il y aurait eu les brûlures de la poudre, de grosses brûlures. Ensuite, ce grand coup dans la tête aurait arraché une partie de la boîte crânienne. Aucune de ces conditions ne fut observée sur le corps. Il semblerait donc que le suicide, en considérant les perspectives apportées par sa personnalité et les lois de la physique, n’est pas probable. Qu’en est-il alors de son frère ou d’un autre officier qui aurait abattu le commandant d’un coup de feu pour lui éviter la capture et la torture ? Ceux qui ont étudié les personnalités et les relations de ces frères pensent que c’est presque impossible à croire, et la théorie n’est appuyée d’aucune preuve. N’importe quel coup tiré à bout portant, que ce soit par Tom CUSTER ou un autre officier, aurait laissé les mêmes traces que s’il l’avait fait lui-même : de grosses brûlures ou une partie du crâne arrachée. Et un officier qui lui aurait tiré dessus depuis plus loin ? A cause de la fumée, de la poussière, de la confusion et de l’intensité de la bataille, les chances que cette hypothèse soit vraie sont minimes. On peut tirer de ces faits quelques conclusions, qui ont plus de mérite que toute autre faite à ce jour. D’abord, CUSTER a probablement été blessé au thorax à, ou près de, « Last Stand Hill ». On ne saura jamais à quel degré d’incapacité, mais il est probable que ce fut un coup perdu ou un coup heureux, car il est connu que les Indiens tiraient mal. Les dernières études archéologiques faites sur le champ de bataille indiquent que quatre vingt dix pour cent des soldats avaient été blessés et étaient encore vivants lorsque le combat prit fin. C’est un fait qui revient tout le temps lors des combats dans l’histoire. Ces blessés furent tués plus tard, beaucoup par les femmes et les enfants qui se déplaçaient avec les guerriers. A ce moment-là, CUSTER, s’il n’était pas déjà mort, fut tué par un Indien depuis une distance où un coup fatal n’aurait pas laissé de traces de poudre brûlée. A six heures le soir du 25 Juin 1876, George Armstrong CUSTER était mort des suites de la bataille. Ce qu’il avait cherché toute sa vie était maintenant à lui : une gloire éternelle et immortelle. Moi, je dis que cet amerloque peut se tromper, car les cavaliers de l’époque, bien que droitiers, utilisaient toujours le pistolet de la main gauche, la main droite étant celle qui tenait le sabre, plus noble. Au corps à corps, continuant à se défendre de la main droite dans laquelle il tenait son sabre, il peut très bien s’être tiré une balle dans la tête avec la main gauche. L’auteur invoque la peur en l’associant au suicide. Mais le suicide dans une telle bataille n’est pas forcément un signe de peur. Il peut très bien vouloir dire aussi « Vous ne m’aurez pas vivant, bande de macaques ! Ah, vous voulez me torturer ? Eh bien, regardez un peu ce que j’en fais, moi, de votre canoé-kayak ! » J’imagine très bien un Indien qui lui enfonce sa lance dans le cœur juste après pour dire qu’il a tué le grand chef « Cheveux Jaunes » et s’en vanter ensuite auprès des autres guerriers, ou simplement de rage parce que l’autre est parti voir le Grand Esprit avant qu’on ne lui donne son billet. Mais, lorsqu’on sait comment ça crache les flammes, un revolver qui tire de la poudre noire, on aurait du remarquer que la tempe de ce monsieur était brûlée tout autour du trou fait par la balle. Comme les corps étaient mutilés, noircis, gonflés, très probablement maculés de sang partout et déjà en décomposition, bonjour d’odeur et le bruit des mouches, il n’est pas impossible que les témoins qui ont ensuite décrit ce qu’ils ont vu, des militaires et pas des médecins chargés d’un autopsie en règle, ne se soient pas trop attardés sur les détails et qu’ils aient négligé de signaler les brûlures. Quant à l’histoire où la moitié de la tête aurait dû partir avec le coup, c’est pas évident. On a vu des photographies de l’époque avec des bandits criblés de trous faits par des balles de .44, dont plusieurs dans la tête, et la boîte crânienne a tenu bon. N’éliminons pas la thèse du coup de revolver tiré de plus loin que le canon sur la tempe, par un collègue pour lui éviter la honte de la capture où il aurait été exhibé de partout, ce grand chef Blanc qui voulait notre mort et qu’on a enfin vaincu, et bien entendu la torture, longue et douloureuse pour bien le faire souffrir, ce salaud qui disait partout qu’un « bon Indien est un Indien mort ». Ca collerait bien. Mais un coup de lance perdue dans le thorax qui le fait crever en dernier, puis un coup de carabine Indienne dans la tête depuis dix mètres, ça collerait aussi…